Donbass : la 4ème vie d’Erwan Castel



Nous vous proposons une interview exclusive d'Erwan Castel, ancien officier français devenu citoyen Russe après une dizaine d'années de combat dans les forces militaires du Donbass. Analyses et réflexions d'un combattant de terrain et non d'un analyste de divan.

[Boris Karpov] Erwan Castel bonjour, beaucoup de nos lecteurs vous connaissent de nom et de réputation. D’abord une petite précision, nous avons des divergences sur certains points géopolitiques mais nous retrouvons sans aucun doute sur le patriotisme Russe, nous parlerons donc de la situation en Russie et de ce qui concerne la Russie.

Vous avez été l’un des premiers français à venir au Donbass en 2014. Non pas pour brasser de l’air comme beaucoup d’autres français cherchant à se faire connaitre mais, humblement, pour défendre vos convictions de la manière la plus courageuse qui soit, en vous engageant dans les forces armées du Donbass. D’autres français ont fait de même, la plupart sont repartis parfois dans des conditions disons « honteuses », vous avez combattu de 2014 à 2022 quand vous avez été grièvement blessé et avez été amputé d’un bras. Vous êtes maintenant citoyen russe.

Alors d’abord cette question que beaucoup vont se poser, vous avez payé très cher votre engagement, vous n’avez pas de regret ? Si c’était à refaire, le referiez-vous ?

Merci tout d’abord de m’inviter à ce dialogue. Je suis arrivé dans le Donbass fin janvier 2015 après m’être initialement engagé sur le front de l’information dès le mois de novembre 2013 pour dénoncer la révolution colorée du Maïdan dont le coup d’Etat néo-nazi final nous a conduit de la guerre du Donbass à la guerre russo-ukrainienne et je crains que cela ne s’arrête pas là. À l’issue des massacres d’Odessa (2 mai 2014) de Marioupol (9 mai 2014) et de Lougansk (2 juin 2014), j’ai décidé de clôturer mon activité de guide expédition en Guyane et de rejoindre physiquement la rébellion Donbass.

Non je ne regrette rien malgré les blessures, les déceptions et les déboires inevitables subis dans mon engagement radical. Si c’était à refaire, je le referai sans hésiter en trouvant le moyen de venir plus tôt et surtout en évitant les français venus s’échouer en Russie.

Lorsque vous êtes arrivé en 2014, la Russie aidait les forces du Donbass en matériel, et ce n’est qu’en 2022 qu’elle est intervenue militairement avec l’Opération Militaire Spéciale (SVO). Pensez-vous que la Russie aurait dû intervenir plus tôt ? Que pensaient, en 2014 et jusqu’en 2022, les citoyens du Donbass à ce sujet ? Et que pensaient les militaires engagés comme vous, sur ce sujet ?

La Russie a effectivement soutenu les séparatistes du Donbass. Politiquement très fortement, Économiquement suffisamment pour permettre la création de deux États de droit à Donetsk et Lougansk, militairement juste pour permettre à leurs milices de tenir tête aux attaques terrestres menées sur la ligne de front.

Je ne suis pas en mesure de juger les choix de Moscou car je n’ai pas connaissance de tous les paramètres qui les ont motivé à cette époque mais on peut effectivement regretter que la Russie ait tardé à intervenir alors que dès 2015 il était évident que les accords de Minsk n’étaient qu’une mascarade pour permettre aux ukro-atlantistes de mieux preparer une nouvelle escalade à dimension régionale. Et lorsqu’on me rétorque que la Russie avait également besoin de temps pour se réarmer et se préparer à l’inévitable conflit qui fait rage, je réponds que le délai des rapports des forces entre 2015 et 2022 n’a pas vraiment changé compte tenu que pendant cette période les forces ukrainiennes se sont considérablement modernisées, normalisées et entraînées grâce aux aides et la présence exponentielle de l’OTAN.

Mais avec des « si » il est trop facile de refaire l’Histoire et de juger. La conduite politique, diplomatique et militaire d’une crise extrême comme la guerre du Donbass ne se fait pas sans sacrifice et erreurs qui parfois sont lourdes de conséquences comme par exemple l’abandon en septembre 2014 de l’offensive républicaine sur une ville Marioupol très faiblement défendue (pour des arrangements diplomatico – économiques), et qu’il a fallu finalement libérer au printemps 2022 au prix de 10 000 tués environ. On pourrait multiplier à l’infini ces « regrets » mais cela ne sert à rien de se lamenter, le plus important est d’aller de l’avant et essayer de ne pas répéter les erreurs du passé.

Pour résumer et répondre à votre question : oui la Russie aurait dû intervenir plus tôt dans le Donbass – comme elle l’a fait en Crimée à cause de l’enjeu géostratégique majeur et vital pour la défense russe de la base de Sébastopol –

Mais cela n’aurait probablement pas évité à moyen terme cette confrontation radicale entre la Russie et l’OTAN qui arrive à grands pas.

De 2015 à 2022, et même après, j’ai découvert avec admiration la capacité de résilience de cette population du Donbass victime de bombardements criminels quotidiens ainsi que sa fidélité infaillible envers la Russie et sa confiance inébranlable en ses choix politiques et diplomatiques parfois difficiles, comme la non reconnaissance du premier référendum de 2014.

Concernant les militaires beaucoup regrettaient le manque de moyens pour réaliser les missions sur le front comme par exemple des moyens d’observation thermique ou la formation moderne des cadres. Nous nous sentions parfois bridés tout en étant convaincus que nous ne serions jamais abandonnés par la Russie, tout en cultivent entre nous cet esprit du grognard qui n’entache pas la discipline et le culte de la mission.

Les améliorations et la normalisation lancées avec la création de la Garde Républicaine sont arrivées progressivement dès 2016 au sein du Corps de défense qui lui a succédé avec l’avantage moral de voir se conserver au sein des soldats du front cet esprit des milices initiales qui soudent bien plus fortement que la discipline formelle : l’esprit de famille et l’Union des Peuples, ce que j’ai personnellement vécu pendant 7 ans au sein de la brigade internationale « Piatnashka ».

Comment a été vue l’intervention de la Russie en 2022 par les citoyens du Donbass ?

L’intervention russe fin février 2022 a été perçue par la population comme un immense soulagement et une quasi libération de 10 années de souffrances, même si le déroulement des opérations ne les a pas encore totalement éradiqué et que le risque d’une guerre mondiale plane encore plus fortement au dessus des têtes.

A l’époque nous suivions avec attention les réunions autour de la proposition russe adressé à Washington d’un traité de sécurité collective en Europe fondé sur un bon sens qui devrait être commun. Puis dans un enchaînement rapide il y a eu le rejet sans surprise de cette proposition par les occidentaux et une escalade militaire violente de la part de forces ukro-atlantistes qui depuis 1 an s’accumulaient sur le front du Donbass.

Le réaction russe de la reconnaissance des républiques populaires de Donetsk et Lougansk (enfin!) accompagnées d’accords de défense mutuelle a galvanisé les esprits qui ont exprimé un enthousiasme unanime et l’intervention russe a été accueillie comme la fin d’un cauchemar que beaucoup (sauf moi et quelques réalistes froids) pensaient imminente.

A cette époque j’accompagne sur le terrain une équipe de TF1 emmenée par Liseron Boudoul (une des rares reporters occidentales méritant encore le qualificatif de journaliste) et qui devait par la suite voir son honnête intellectuelle et son éthique professionnelle être sanctionnées par sa direction aux ordres d’une doxa russophobe violant radicalement la charte de Munich. Lorsque qu’elle me demande au cours d’un entretien filmé le 2 mars combien de temps cette guerre allait durer je lui ai répondu sans hésiter « minimum 3 ans » alors que la majorité des courtisans et experts pro-russes de salon péroraient qu’entre 3 semaines et 3 mois l’Ukraine bandériste serait vaincue.

Aujourd’hui, lorsque je regarde les nécrologies militaires et civiles de chaque côté du front, j’eusse préféré m’être trompé…. Hélas !

Dans le Donbass, malgré les pertes terribles de 2022 subies par les corps d’armée de Donetsk et Lougansk et les massacres de civils provoqués par les bombardements ukro-atlantistes, le moral global des populations du Donbass reste inchangé. L’enthousiasme du printemps 2022 redonner sa place à la résilience héroïque des familles et des volontaires qui soutiennent à chaque instant les soldats libérant difficilement leurs libertés et leurs territoires russes. Cela dit le peuple du Donbass dans l’intimité de son engagement radical pour la Russie reste réaliste et critique amèrement ceux qui par overdose de propagande font et refont les mêmes erreurs que lorsqu’ils ont envoyé les opérations militaires russes « se prendre les pieds dans le paillasson » d’une Ukraine complètement formatée depuis des années par une propagande occidentale et préparée par l’OTAN à se sacrifier pour les intérêts de l’Oncle Sam.

Le plus dur est devant nous car l’ennemi aujourd’hui n’est plus le pouvoir de Kiev mais l’OTAN dans son ensemble.

La raison donnée par le Président Poutine au SVO a été « la démilitarisation et la dénazification de l’Ukraine ». Comment, en termes très concrets, voyez vous cet objectif ? Prendre la totalité de l’Ukraine ? Se contenter du Donbass russophone ? Avec une « zone tampon » jusqu’à la frontière polonaise ?

En terme de communication il est fort dommage que la Russie ne soit pas à la hauteur des valeurs, des principes et du bon sens commun qu’elle défend.

Concernant les objectifs déclarés, « dénazification » et « démilitarisation » ils sont à la fois réels et légitimes mais aussi trop simplistes et populistes. Lorsque le président Poutine explique depuis le discours de Munich en 2007 jusqu’aux conditions d’éventuelles négociations avec Kiev que l’Ukraine doit rester neutre entre l’Est et l’Ouest et en aucun cas intégrée l’OTAN, c’est selon moi l’objectif prioritaire des opérations militaires spéciales russes de 2022 ce qui non seulement peut être compris par le peuple et surtout ne le fait pas s’interroger comme le jour où des dizaines de prisonniers nazis du bataillon Azov capturés au prix de lourdes pertes lors de la « dénazification » de Marioupol sont échangé quelques semaines plus tard contre l’oligarque ukrainien pro-russe Medvedchouk.

Aujourd’hui il faut être honnête et cohérent avec ceux à qui ont demandé sueur et sang. Et si on prétend qu’aujourd’hui la Russie est en guerre contre l’OTAN, ce qui est une réalité de plus en plus directe, alors l’objectif doit être la défaite de l’OTAN ou au pire son retrait de tous les pays frontaliers de la Fédération de Russie, au même principe de bon sens que JFK avait demandé en 1962 le retrait du Pacte de Varsovie, représenté par des bases russes, de l’île de Cuba.

Sinon pour être réaliste, côté « démilitarisation » et malgré les pertes énormes subies, l’armée ukrainienne est plus puissante qu’en 2021 avec plus de moyens sophistiqués, autant de combattants formés et des réserves encore importantes (pour le moment), et côté « dénazification » si les héraut de l’idéologie bandériste de 2014 ont largement diminué, leur héritage russophobe est toujours actif, surtout depuis qu’ils ont été pour beaucoup dispersés au sein d’unités régulières. Dans le domaine politique je suis persuadé que les bandéristes l’ont simplement un peu plus mis en veilleuse pour ne pas froisser les donateurs occidentaux droitdelhommistes.

À cheval sur ces 2 objectifs militaires russes on voit arriver en Ukraine de plus en plus de combattants mercenaires issus des milieux néo-nazis étrangers.

La Russie qui mène depuis bientôt 2 ans une guerre d’attrition efficace doit maintenant « passer à la vitesse supérieure » avant que le facteur « temps » ne profite aussi à l’ennemi comme par exemple pour la formation opérationnelle de ses nouvelles brigades ou pilotes.

Côté OTAN, ce n’est pas gagné car l’Alliance militaire occidentale a gagné la Suède et la Finlande (1300 km de frontière avec la Russie) privatisant ainsi la mer Baltique, sans compter l’Arménie et la Moldavie qui sont entraînées vers elle… Et surtout derrière les aides militaires à l’Ukraine on observe une modernisation et un renforcement de toutes les armées en Europe, principalement celles des anciennes Républiques socialistes soviétiques.

Donc pour conclure sur cette question, les « dénazification » et « démilitarisation » de l’Ukraine non seulement ne sont pas achevées mais elles ne sont que l’écume du vague nommée OTAN et fonce en grossissant vers la Fédération de Russie et ses alliés. Je termine en précisant à ceux qui me trouvent pessimiste que je reste confiant en la victoire de la Russie mais me tiens juste éloigné des fantasmes propagandistes qui ont prouvé en 2022 leur contre productivité opérationnelle.

Selon moi aujourd’hui la paix ne pourra revenir dans cette région pontique maintes fois disputée entre l’Est et l’Ouest que

1 / lorsque tous les territoires russes arbitrairement cédés à l’Ukraine soviétique seront restitués officiellement à la Russie soit toute la Novorossiya (d’Odessa à Dnepropetrovsk en passant par Nikolaïev, Kherson et Zaporodje) ainsi que le Donbass et Kharkov au minimum.

2 / que le reste de l’Ukraine signe devant l’ONU son refus définitif d’intégrer l’OTAN mais aussi l’UE (depuis son ambition dans la défense) et limite sa puissance militaires à des forces intérieures qui auront comme mission prioritaire d’éradiquer toute revendications bandériste et russophobe.

3 / Que l’OTAN se retire des pays frontaliers à la Russie et signe un traité de sécurité collective pour l’Europe mais aussi pour l’Asie centrale.

Utopique me direz vous ?

Entièrement d’accord !

Voilà pourquoi il faut n’accepter aucun cessez-le-feu avant la capitulation totale de l’Ukraine et l’humiliation radicale de l’OTAN.

Cet objectif, pour vous, peut-il être atteint ?

Oui mais ni à court terme ni avec les moyens déployés jusqu’à présent.

Il faut une mobilisation générale en Russie et la création d’une alliance militaire équivalente à l’OTAN intégrant les pays alliés qui seront liés dans un traité d’assistance militaire collective. Cette perspective a été suggérée lorsque des unités chinoises sont venues s’entraîner en Biélorussie ou que le Corps Africain russe (Wagner) intervient à la demande de pays africains… il faut juste institutionaliser ce front militaire antimondialiste.

Il est évident qu’un affrontement militaire direct entre l’OTAN et la Russie serait suicidaire pour tous et les occidentaux le savent, il convient donc de contraindre l’OTAN à d’abord abandonner sa forme idéologique actuelle qui est au seul service de l’hégémonie étasunienne en bloquant toutes ses guerres périphériques par la destruction de tous ses idiots utiles comme en Syrie ou forces auxilliaires comme en Ukraine.

Ce qui aura pour conséquence d’épuiser plus encore le système mondialiste qu’elle sert et qui la nourrit. Mais il faut travailler sur le long terme et en même temps réagir promptement (pas comme en Ukraine) lorsque surgit une nouvelle menace mondialiste. Par exemple aujourd’hui le Vénézuela doit être protégé de toute tentative de renversement de la part des États-Unis qui perdent le contrôle du pétrole au Moyen-Orient.

La force de l’Hégémon occidental est d’avoir une vision stratégique à très long terme. On le voit par exemple dans le projet sioniste en Palestine avec le travail des ONG dans la zone d’influence russe.

Les pays non alignés doivent aujourd’hui cesser de réagir – souvent trop tard – et mener collectivement un plan d’action à long terme et dans tous les domaines pour étouffer l’anaconda mondialiste.

Dans le domaine de l’économie la Russie a réussi a relever ce défi et l’échec des sanctions économiques subies ainsi que la croissance des BRICS en sont des illustrations parfaites.

La priorité stratégique aujourd’hui est d’organiser une force militaire antimondialiste unie car cela reste la clef de voûte de l’hégémonie occidentale.

Aujourd’hui les forces russes ont en face un ennemi appuyé par l’ensemble de l’OTAN et n’ayons pas peur de le dire, ceci n’avait probablement pas été prévu par les responsables russes. Pensez-vous que l’objectif défini par Vladimir Poutine est remis en question ?

Le fait que la Russie affronte aujourd’hui l’OTAN n’est pas géopolitiquement une surprise. En revanche la capacité de résistance à la fois militaire et morale de l’armée ukrainienne mais aussi la résilience de la population ont je pense été sous estimées par l’État Major russe en 2022 de même que l’obstination des occidentaux à déverser depuis des milliards d’aides matérielles et financières aux bandéristes.

Il y a de toute évidence une carence surprenante de la part du Renseignement extérieur qui a mené l’État Major russe à tout miser sur une démonstration de force dissuasive qui aurait pu devenir catastrophique voire humiliante si les corps d’armées du Donbass n’avaient pas obtenu de francs succès dès les premières semaines et si le front russe, initialement sur 2000 km environ n’avait pas été réduit de moitié rapidement pour reconcentrer ses effectifs et moyens sur le Donbass.

À partir de là, on voit apparaître le paradoxe de l’armée russe avec d’une part des procédures vétustes inadaptées et une chaîne de commandement obsolète dans un conflit où la logistique, la technologie, la rapidité de réaction et l’initiative dominent le champ de bataille moderne et d’autre part ses capacités tactiques et industrielles à s’adapter et produire des solutions face aux nouveaux défis de la guerre moderne. On l’a vu notamment avec la composante des drones d’observation et d’attaque et la numérisation horizontale du champ de bataille (communication numérique de type hub et directe entre les unités de l’avant et les unités d’appui sans monter et redescendre leurs chaines de commandement respectives) qui sont sans conteste une des plus mauvaises surprises de l’armée russe en 2022.

Si l’artillerie de masse et les blindés avec l’aviation furent les révolutions des 2 premiers conflits mondiaux, les drones qui offrent à tous les combattants sans exception de pouvoir travailler avec la troisième dimension sont la grande révolution de cette 3ème guerre mondiale commençant et qui bouleversent tout l’art opératif militaire.

Or on s’aperçoit qu’en moins d’une année les forces russes avec l’appui de leur industrie de l’armement ont su s’adapter à cette révolution des drones jusqu’à y dominer un adversaire pourtant soutenu par toute la technologie occidentale. Des nouvelles protections pour les véhicules aux drones d’observation et d’attaque produits et utilisés quotidiennement en masse en passant par les armes de défense électromagnétique, du soldat à l’ingenieur la Russie a démontré son génie militaire et ses capacités d’adaptation victorieuses… à condition que les bureaucrates comprennent qu’en temps de guerre, le résultat est parfois prioritaire sur le règlement et l’imagination préférable à la répétition.

Cependant on peut constater aussi que dans d’autres domaines du terrain « le roi est nu » comme par exemple dans l’artillerie tactique de longue portée et précision, l’effectif de sa flotte de radars aériens (type AWACS) etc.

Aujourd’hui la Russie fait face sans pouvoir réagir à des moyens développés par une OTAN qui joue perfidement avec les lignes rouges juridiques internationales pour intervenir directement dans le conflit par exemple en appuyant les attaques des missiles et drones ukro-atlantistes depuis l’espace aérien international, celui de l’OTAN (Roumanie) et spatial, avec ressources de renseignement électronique aéroporté.

Donc je pense que l’objectif défini par le président Poutine est toujours valable et est en cours d’exécution (très lente) mais qu’il n’est plus « final » limité à l’Ukraine, mais qu’il est une première étape d’un conflit militaire global contre l’OTAN en gestation qui a été précèdé par une guerre économique occidentale sans précèdent, le tout sur fond de choc de civilisation entre un monde multipolaire fondé sur les interactions d’un diversité de communautés de l’Être contre le transhumanisme du monde unipolaire de l’Avoir.

Le président Poutine espérait je pense que ses « partenaires occidentaux » reviendraient à la raison d’un intérêt commun, dans l’esprit des dirigeants de l’Occident immoral du passé mais qui, connaissant encore les douleurs de la guerre et les limites de la folie pratiquaient encore un certain pragmatisme politique. Malheureusement l’Occident immoral est devenu un Hégémon idéologiquement amoral et politiquement dogmatique avec lequel il est impossible de négocier.

Aujourd’hui la Russie n’a pas d’autre alternative que d’accepter le combat à mort imposé par la ploutocratie mondialiste car il est existentiel autant pour les peuples de Russie attachés à la souveraineté unifiée de leurs identités multiples autant que pour le grand Capital entré dans une crise mortelle irréversible depuis 2018 et pour qui la guerre est un joker pour tenter de réinitialiser son système (crise/guerre/reconstruction). C’est pour cette raison que l’aigle étasunien via l’OTAN ne lachera jamais son auxilliaire ukrainien sur lequel il a tant misé pour griffer l’Ours russe.

Mais cette guerre existentielle pour être gagnée par la Russie doit aussi être menée contre les ennemis intérieurs du Kremlin, qu’ils soient ataviques comme la bureaucratie infernale et paralysante ou libéraux œuvrant consciemment ou pas pour la 5ème colonne occidentale.

Même si à cause de votre blessure vous n’êtes plus sur le front, vous avez gardé des contacts parmi les combattants de première ligne. Comment aujourd’hui voient-ils la situation sur un plan général ? Durant la Grande Guerre Patriotique, l’objectif était clair pour tout le monde, c’était « À Berlin! ». Aujourd’hui sur le front, est-ce « À Kiev! » ? Comment les combattants voient-ils l’avenir des opérations ?

Les soldats sur le front obéissent et se concentrent sur les missions et environnements tactiques attribués mais la plupart ont conscience que cette guerre russo-ukrainienne risque de n’être que le deuxième acte d’une guerre totale contre l’OTAN (le premier acte étant la phase « conflit du Donbass » 2014-2022 déclenché par le coup d’État bandériste du Maïdan).

Par ailleurs les soldats du front, tout en étant critiques parfois vis à vis des décisions bureaucratiques du commandement, restent disciplinés et motivés car, de leurs valeurs familiales à celles défendues par la Russie, il y a une unité ontologique et un héritage historique commun appartenant à une « idée d’empire » commune.

Cette idée d’empire que l’on pourrait résumer comme une « Unité dans la diversité » qui doit être naturellement défendue dans le coeur de chaque soldat et au delà de toute idéologie politique ou identité communautaire particulière car la Fédération de Russie actuelle qui en est l’héritière s’est engagée à défendre, et avec elle, la diversité la composant.

Cependant nous espérons tous au fond de nous mêmes que l’OTAN finira par abandonner sa stratégie en Ukraine dès que la capitulation de Kiev aura été prononcée. Mais plus le temps passe dans des combats très lents et difficiles, plus cet espoir s’amenuise devant l’obstination suicidaire de l’OTAN de considérer la Russie comme son ennemi mortel jusqu’à s’engager de plus en plus directement aux côtés de ses auxilliaires bandéristes.

Lorsque la perspective d’un conflit mondial est évoqué, le soldat du front hausse les épaules et garde le sourire car il a confiance en la victoire finale de ses armes et de sa foi face à un monde occidental dégénéré dans l’obsession du fric et l’obscenité d’un transhumanisme hors sol. Seule compte pour lui la fidélité à ses valeurs dans l’Union des Peuples.

Je suis surpris de constater la compréhension globale par la quasi majorité des soldats du front quand à la géopolitique internationale qui solidarise entre elles dans leurs enjeux beaucoup de guerres et de crises en cours. De plus cette analyse du soldat ne relève pas d’un psittacisme des communiqués officiels russes qui sont souvent moqués pour leur exagération manichéiste mais bien d’un regard et d’une opinion libre fondées sur une culture générale individuelle une curiosité de ce qui se passe en Occident et une liberté de penser dans le respect du bon sens commun. Rares sont les soldats qui mettent en avant des idéologies dogmatiques à l’image des pensées politiques occidentales ce qui peut être la conséquence de la réalité de cette diversité humaine constituant la Russie depuis des siècles.

Je terminerai cependant par un bémol : il y a de toute évidence une infection libérale dans les grandes villes de Russie qui est visible entre autre par un comportement individualiste des jeunes générations concentré sur les droits individuels et qui à terme peut nuire (comme en Occident) au sentiment d’appartenance collective et aux devoirs patriotiques qu’il induit. C’est malheureusement le lot de toutes les grandes villes à travers le Monde : la perte des repères naturels et valeurs traditionnelles jusqu’à la perte de l’éducation des relations et une déshumanisation des comportements allant inévitablement vers un ensauvagement de la société.

Le pouvoir politique devrait limiter l’extension urbaine en dispersant les centres économiques sur l’ensemble de son territoire.

L’équilibre géographique des ressources permet de combattre les inégalités territoriales et les dérives délétères du « tout grand centre urbain » (sous prolétariat, perte d’identité etc) ainsi que de mieux prévenir et combattre ses dérives modernes (trafics, migration clandestine, criminalité etc.). Car la Russie malgré tous ses efforts n’échappe pas aux dérives anthropologiques d’un monde moderne replié dans une urbanisation inhumaine.

Il semble établi que l’OTAN ne laissera pas tomber l’Ukraine, quelque soit d’ailleurs le prochain président americain. Aujourd’hui des armes de plus en plus sophistiquées arrivent en Ukraine (aviation, drones plus performants, missiles à longue portée), mais il semble qu’il n’y ait pas assez par exemple de pilotes ukrainiens qualifiés pour voler sur les F-16. Pensez-vous, par exemple, que des pilotes de pays de l’OTAN piloteront ces avions ?

On sait également que des unités françaises sont déployées en Ukraine malgré les dénégations de Macron, plusieurs militaires français ont d’ailleurs déjà été liquidés par nos frappes aériennes.

Lorsque le sujet de l’OTAN est abordé, on évoque surtout les chiffres des forces en présence, de la baïonnette au missile nucléaire stratégique ce qui est un élément d’appréciation incomplet car il néglige la dimension idéologique et économique de cette organisation qui d’un fonction militaire « défensive » définie pendant la guerre froide est devenue le cœur systèmique d’un Hégémon capitaliste naufragé qui n’existe encore aujourd’hui que grâce à une fuite en avant militaro-industrielle qui le nourrit de ses propres crises.

Voilà pourquoi je ne crois pas un seul instant aux promesses délirantes de paix en 24 heures d’un candidat Trump qui a plus que jamais besoin de l’OTAN, ne serait-ce que pour continuer sa stratégie hégémonique vis à vis de l’Iran ou de la Chine par exemple qui ne l’oublions pas sont les alliés de la Russie. Entre les démocrates et les républicains étasuniens seules les priorités changent mais l’objectif final reste le même : imposer une suprématie étasunienne à travers le Monde en soumettant les pays non alignés ou au pire en les rendant dépendants d’une puissance économique et géostratégique étasunienne.

Concernant l’OTAN il ne faut pas oublier que depuis la fin de l’URSS elle est passée d’une fonction défensive à une fonction offensive de la guerre en Yougoslavie jusqu’à celle en Libye ainsi que par son expansion territoriale vers la Russie et que depuis Rasmussen et Stoltenberg, ses 2 derniers secrétaires généraux, elle a opéré une métamorphose politique en devenant le fer de lance supranational d’une idéologie mondialiste.

La stratégie de l’OTAN en Ukraine et pour laquelle l’opération de charme de l’Union Européenne n’est qu’un miroir aux alouettes a bien sûr un objectif en surface, visible et brutal qui est de tenter d’affaiblir la Russie par procuration via cette guerre russo-ukrainienne commencée à l’initiative du pantin Tourtchinov en avril 2014.

Stratégiquement le coup d’État du Maïdan (février 2014) est un échec de l’OTAN en Ukraine car par lui, les occidentaux voulaient reprendre le contrôle des rives septentrionales de la Mer Noire et principalement la base stratégique russe de Sébastopol qui est la sentinelle avancée au Sud de la Défense occidentale russe (la sentinelle Nord étant Kalinnigrad). Or, non seulement la Russie a su protéger sa péninsule de Crimée mais aussi une parties de des territoires historiques du Donbass et de la Novorossiya qui sont revenus dans son giron. Cependant la guerre n’est pas encore terminée et il est trop tôt pour crier victoire même si militairement les forces russes augmentent chaque jour leur initiative et leur avantage.

Cependant pour être honnête, l’OTAN que Macron décrivait en « mort cérébrale » a obtenu des succès importants depuis 2022 et qui révèlent la partie immergée de son iceberg stratégique lancé vers la Russie :

1 / Poursuite de l’extension vers l’Est avec notamment l’entrée de la Suède et de la Finlande (1300 km de frontière avec la Russie) avec ouverture des territoires nordiques à l’implantation de bases étasuniennes

2 / Déstabilisation politique vers l’alliance de la Moldavie et de l’Arménie qui étaient alliés de la Russie, troubles organisés en Géorgie, au Kazakhstan… réveil du terrorisme islamique dans le Caucase etc.

3 / Modernisation des armées de l’alliance, notamment celles de anciens pays de l’Est qui ont remplacé leurs « donations » à l’Ukraine par des matériels plus récents et performants.

4 / Renforcement de l’unité russophobe des membres de l’alliance mis à part quelques poids légers comme la Hongrie et la Slovaquie jusqu’à l’augmentation des budgets militaires.

Donc si l’OTAN peine et s’épuise en Ukraine cela ne signifie pas qu’elle est globalement défaite et sa réactivité au Moyen-Orient face à l’escalade du conflit israélo-palestinien en est une des preuves convaincantes.

« Ne jamais sous estimer l’ennemi » nous rappelait Sun Tsu il y a plus de 2000 ans et cet adage est toujours d’actualité, les forces russes en ont fait l’expérience au printemps 2022.

Concernant l’engagement de l’OTAN en Ukraine il est progressif  et ce n’est pas une nouveauté dans les interventionnismes militaire occidentaux :

Entamé en 2015 avec des conseillers militaires (comme au Vietnam par exemple) puis des instructeurs, il s’est poursuivi avec une augmentation de leurs effectifs doublé d’envoi de matériels de plus en plus performants dans une rhétorique prétendant nous faire croire à leur fonction « défensive » (même rhétorique concernant Israël).

Parallèlement à cet engagement officiel progressif il faut repérer 2 autres actions de l’OTAN :

1 / L’envoi de mercenaires individuels recrutés dans des milieux extrémistes d’une extrême droite ataviquement russophobe, mais financés et encadrés par des personnels de l’OTAN, soit les instructeurs précédemment cités soit des personnels « mis en disponibilité » ou récemment en fin de contrat et grassement payés pour ces missions en Ukraine.

Cette privatisation des interventions militaires occidentales n’est pas nouvelle et si elle est plus coûteuse que des forces régulières elle est beaucoup moins risquée en terme de droit international, notamment concernant la responsabilité juridique des États commanditaires (à l’exemple des réseaux francais de Bob Denard ou des SMP étasuniennes type Black Water faisant le sale boulot de Paris et Washington).

2 / Le déploiement des ressources du renseignement aéroporté de l’OTAN dans des missions de renseignement et d’appui aux forces ukro-atlantistes.

C’est certainement le volet le plus critique et radical de l’engagement actuel de l’OTAN dans la guerre russo-ukrainienne avec ses engagements politique, économique, logistique et de formation et encadrement.

D’abord déployés pour observer l’évolution du conflit comme le font la plupart des états confrontés à un conflit frontalier (j’ai moi même fait du renseignement, lors de la guerre civile du Maroni, sur la frontière entre Surinam et Guyane française dans les années 80), les pays de l’OTAN ont transmis les renseignements obtenus sur les forces républicaines et les forces russes à Kiev pour affiner leurs opérations militaires.

Mais depuis 2022, les ressources électroniques de l’OTAN occupent une place vitale dans les attaques ukro-atlantistes contre des cibles russes lointaines et réalisées avec des munitions guidées (missiles, drones aériens et terrestres notamment). L’OTAN ici recherche, identifie et géolocalise les cibles en temps réel ce qui permet le quidage avec une et précision métrique pour les détruire.

Pour cette engagement opérationnel l’OTAN joue lâchement avec les lignes rouges d’un droit international obsolète qui autorise les pays à évoluer librement dans un espace international maritime ou aérien tout en utilisant des ressources militaires contre un pays tiers, ici des moyens électroniques.

Ainsi avant chaque attaque ukro-atlantiste les aéronefs de l’OTAN chargés de géolocaliser les cibles russes opèrent à l’abri des espaces aériens national roumain ou international de la Mer Noire.

3 / Le déploiement de forces spéciales sur les théâtres d’opérations qui est confirmé en Ukraine avec notamment la CIA étasunienne qui a admis avoir organisé une dizaine de bases secrètes pendant la guerre du Donbass, le SBS britannique qui sous couvert d’encadrement de la base des commandos marines ukrainiens d’Ochakov (entre Odessa et Kherson) réalise des missions opérationnelles au profit de Kiev, et enfin des équipes du COS français notamment issues du 13e RDP autres régiments spécialisés dans les missions de renseignement et d’action clandestines. Ce qui nous amène à votre question sur l’engagement français.

Il y a dans l’information une confusion entre les déploiements des mercenaires volontaires et ceux des forces spéciales, ce qui est logique sur le plan de l’exploitation propagandiste de leur présence et comme je viens de l’évoquer de la présence dans les groupes de mercenaires de cadres de forces régulières missionnés par leurs pays.

Concernant la France l’engagement privé ou étatique suit la progression de celui de l’OTAN en Ukraine.

En 2015 il y avait de mémoire une cinquantaine de français dans les rangs du bataillon néo nazi Azov (des civils passant à l’époque le blokpost sur la ligne de front témoignaient de groupes complets parlant français) et d’autres plus éparpillés dans d’autres bataillons spéciaux ukrainiens. Si les formateurs francais en Ukraine étaient dans le temps de la guerre fermée du Donbass plus discrets que leurs collègues britanniques, étasuniens ou canadiens chargés des bases de formation, on en trouve cependant la trace à Marioupol par exemple en 2022 lors de la conquête d’Azovstal.

Ce qui est confirmé, c’est que l’engagement des français va augmenter en parallèle aux livraisons d’armes sophistiquées à l’Ukraine disposant de systèmes protégés (transmission cryptées, codes etc) que les forces occidentales ne veulent confier à personne d’autres que leurs spécialistes. Par exemple le missile aérien franco britannique SCAL EG ou Storm Shadow.

De 3 sources sûres, des équipes du 13e RDP (où j’ai servi) sont déployées depuis plus d’un an sur le front Sud sous le nom fallacieux de « détachement de liaison » probablement avec d’autres équipes des 11e choc et 1er RPIMA (le mari tué en Ukraine de la veuve interviewée par votre correspondante en France était certainement du 1er RPIMA un régiment des forces spéciales françaises)

On se souvient du bombardement russe au début de l’année sur une base militaire ukrainienne sur le Dniepr à l’Est de Kherson au cours duquel 2 prétendus « humanitaires » francais ont été tués… une couverture classique pour ce genre de mission clandestine et que leur présence dans une base militaire ukro-atlantiste a confirmé.

Il reste maintenant à évoquer les élucubrations de Macron concernant le potentiel déploiement d’unités de combat françaises en Ukraine.

Plus généralement, pensez-vous que les forces de l’OTAN vont intervenir directement et officiellement dans les combats en Ukraine ?

L’intervention des forces de l’OTAN dans le conflit russo-ukrainien est aujourd’hui effective et s’est réalisée progressivement :

– conseillers militaires
– instructeurs
– ressources aéroportées du renseignement
– mercenaires encadrés
– forces spéciales et détachements de liaison

Parallèlement ces missions de l’OTAN en Ukraine ont progressé à la fois dans un déploiement progressant jusqu’au front et leur participation de plus en plus active dans les opérations militaires. Ainsi des premiers conseillers militaires étasuniens confinés dans les États majors kieviens et des instructeurs canadiens basés sur la frontière polonaise, on est arrivé à des forces spéciales déployées sur le front, des aéronefs de l’OTAN appuyant les frappes des missiles fournis à Kiev (ciblage et guidage) en passant par des personnels « mis en disponibilité » et encadrant au combat les unités de mercenaires étrangers.

Concernant le déploiement d’unités de combat régulières occidentales sur le front russo-ukrainien (on a évoqué souvent des unités de la Légion Étrangère française par exemple) je pense qu’il s’agit encore – pour le moment – d’un fantasme confondant les forces spéciales déjà évoquées précédemment (mais qui n’en sont pas moins des soldats réguliers étrangers).

En revanche et pour ne parler que de la collaboration française à la guerre contre la Russie, il y a effectivement un important déploiement opérationnel dans les régions roumaines frontalières de la région d’Odessa et de la Moldavie (donc de la Pridnestrovie / Transnistrie).

Il s’agit de 2 Groupes Tactiques Interarmées déployés entre la base de l’OTAN de Constanța (qui devient la plus grande base de l’alliance en Europe avec 10 000 hommes permanents) sur la Mer Noire et la base roumaine de Cincu plus au Nord (qui accueille des forces françaises et polonaises notamment). D’ailleurs les services de l’équipement de l’armée française ont décroché des contrats d’agrandissement de cette dernière base de Cincu.

Mais cette activité militaire interne à l’OTAN qui pourrait être banale doit être mise en perspective de plusieurs autres réalités liés à la guerre russo-ukrainienne :

1 / La base de Constanța est dans le secteur où opère la reconnaissance aéroportée et maritime de l’OTAN appuyant les attaques ukro-atlantistes en Mer Noire et Crimée.

2 / La Moldavie est en train de basculer dans l’OTAN sous le gouvernance de Sandu (d’origine roumaine) avec la complicité officielle de la Roumanie qui veut l’annexer et officieux de l’Ukraine qui veut, entre autres objectifs, récupérer le plus grand stocks de munitions soviétiques de la guerre froide situé au Nord de la Transnistrie.

Or Paris a également signé avec Chisinău un accord bilatéral de sécurité alors que Sandu mène contre les régions autonomes de Pridnestrovie et Gagouazie une politique russophobe de plus en plus radicale qui risque de provoquer des troubles graves.

Rajoutons à cela la rhétorique interventionniste du Président français Macron qui a évoqué Odessa 3 fois en début d’année et nous avons la mise place d’une intervention l’OTAN en Ukraine via une crise majeure débordant sur la Transnistrie enclavée (où est déployé un contingent russe de 1500 hommes environ).

Des unités spéciales britanniques étasuniennes et françaises sont présentes en nombre important sur la région d’Odessa et le front de Kherson, confirmant bien que l’accès ukrainien à la Mer Noire reste l’enjeu majeur de la stratégie de préemption de l’OTAN engagée en 2014.

Donc personnellement je ne crois pas que le premier déploiement d’unités de combat régulières françaises (si il a lieu) sera fait du côté de Kharkov mais plutôt sur la façade roumaine.

Aujourd’hui l’offensive de Koursk est, de l’avis de certains, potentiellement une diversion certes coûteuse préparant une action plus importante sur le front Sud (Zaporizhia et/ou Crimée).

Dans cette hypothèse, une réactivation du front de Transnistrie pourrait constituer la porte d’entrée de l’OTAN dans la région d’Odessa qui deviendrait une base arrière des opérations ukro-atlantistes Sud à protéger prioritairement.

Comment voyez-vous, aujourd’hui, l’évolution de la situation ? Des « experts » prédisent la fin du conflit cette année, d’autres en 2025, d’autres plus loin, qu’en pensez-vous ?

Lorsque les « Opérations Militaires Spéciales » russes ont été engagées fin février 2022 en Ukraine pour mettre fin au conflit du Donbass j’ai publiquement déclaré lors d’une interview que cette escalade de la guerre allait durer minimum 3 ans (quand les experts de salon et autres propagandistes courtisans fantasmaient sur 3 semaines), et fîn mars j’écrivais qu’il manquait 300.000 hommes aux forces russes pour obtenir la capitulation du régime de Kiev. J’eusse préféré m’être trompé croyez moi tout comme pour mes analyses concernant le déploiement des HIMARS, l’offensive ukro-atlantiste de Balaklaïa, les drones maritimes en Mer Noire, la participation active du renseignement aéroporté de l’OTAN aux attaques de Kiev (que je dénonce depuis 2019) ou l’insuffisance de la couverture radar aéroportée russe…

Mais pour moi le plus grave :

– une sous estimation russe des capacités ennemies (en partie due à l’anesthésie des propagandistes de salon et au fétichisme de l’invincibilité militaire de la victoire de 1945)

– un manque d’anticipation, des autosatifactions carriéristes et même des impérities régulières qui conduisent à des revers inadmissibles, comme celui subi récemment sir les frontières de Koursk.

Enfin un atavisme bolchévique paralysant les initiatives, les remises en question, les retours d’expérience dans une bureaucratie générale basée sur la peur du chef et la suspicion du subalterne.

Or, en temps de guerre c’est le « culte de la mission » et non celui du chef, de la carrière ou des procédures du passé qui doit seul diriger actions et relations de commandement.

Je reste confiant car nous voyons monter dans la hiérarchie militaire russe des officiers venant de l’école réelle de la guerre et qui seront la colonne vertébrale aguerrie et les têtes froides et lucides de l’armée russe lorsqu’elle affrontera inévitablement les forces de l’OTAN.

En attendant l’épuration du haut commandement qui a commencé, la lutte anti-corruption doit s’intensifier en abordant le domaine opérationnel et s’étendre aux autres ministères.

Cette réalité n’est pas l’exclusivité de la Russie mais une constante à la fois historique où au seuil de tout conflit d’un nouveau type une épuration des carriériste et des momies est nécessaire (pensons par exemple au « limogeage » en 1914 des centaines de généraux français qui étaient restés au XIXème)

Concernant l’évolution du conflit, je n’ai pas de « boule de cristal », surtout qu’il dépend aujourd’hui de plusieurs inconnues majeures tel que l’engagement total des armes occidentales sur le territoire russe non contesté [Kursk, Belgorod etc – Note de la rédaction] et la réaction ou non de la Russie, l’activation potentielle d’un conflit périphérique, les élections américaines (encore que je n’accorde aucune confiance aux promesses d’un Trump qui n’est que l’autre face du dollar hégémonique). Enfin l’inconnue du théâtre d’opérations au Moyen-Orient qui si il se régionalise radicalement aura des répercussions sur la tectonique pontique etc…

Ce qui est certain en revanche c’est que l’évolution du conflit russo-ukrainien ne sera terminé que lorsque l’OTAN disparaîtra ou au pire reculera vers ses limites originelles loin des frontières de la Fédération de Russie.

Sans vouloir donner un ton dramatique à ces propos, nous sommes entrés dans le cycle d’un troisième conflit mondial initié par les occidentaux via l’OTAN et ses forces auxilliaires, avec:

une annonce en Yougoslavie en 1999,
une répétition en Géorgie en 2008,
un lever de rideau sur le Maïdan en 2014,
un prologue Donbass jusqu’en 2021
un premier acte (SVO) en 2022,

L’offensive sur Koursk marquant peut-être la transition vers le deuxième acte.

Durant la Grande Guerre Patriotique c’est l’ensemble de la population qui était mobilisée pour aider ceux qui étaient au front. Aujourd’hui, même si de très nombreux citoyens aux 4 coins du pays aident nos forces en argent et matériel, pensez-vous que la majorité de la population a conscience de la situation ? C’est ce que j’exposais dans un article précédent, qu’en pensez-vous ?

Mobiliser, ou perdre.

Je plussoie à l’esprit de votre article, considérant qu’à vouloir rester assis entre les sacrifices sociaux qu’impose la guerre et les conforts économiques qu’offre la paix on finit par terre.

Appeler la situation depuis 2022 « Opérations Militaires Spéciales » (SVO) russes en Ukraine alors que pendant 8 ans, le même pouvoir a dénoncé (à juste titre) l’hypocrisie d’une « Opération Spéciale Antiterroriste » ukrainienne dans le Donbass qui cachait une guerre réelle contre le monde russe est pour le moins une nouvelle erreur de communication ou au pire une déconnexion ontologique avec la réalité de la guerre.

Nous approcherons cette année 2024, en additionnant les pertes ukrainiennes et russes le chiffre tragique de 1 million de morts dans ce nouveau conflit fratricide européen (soit environ 4 millions de blessés dont 1 million d’invalide)… et ce n’est pas terminé !

Il est donc grand temps selon moi d’appeler un chat un chat et une guerre une guerre et de prendre toutes les mesures en conséquences pour la conduire radicalement vers la Victoire.

Oui, toutes les forces vives, militaires et civiles, sociales, morales, économiques et spirituelles doivent être tendues vers la victoire de nos armées, surtout lorsque l’ennemi qui est aux portes de l’empire se révèle être une coalition internationale mue par un impérialisme mortel et amoral.

Après, concernant une mobilisation physique de la population qui selon est nécessaire il faut gérer plusieurs paramètres qu’elle induit :

1 / Le paramètre ontologique

Nous ne sommes plus en 1941 où une conscience collective patriotique dominait toutes les couches sociales. Aujourd’hui la Russie, malheureusement, n’échappe pas à la dégénérescence civilisationnnelle du monde moderne ou l’individualisme et le consumérisme sont devenus omniprésent dans les grandes villes occidentalisés. Il n’y a qu’à observer le comportement des passagers du métro moscovite, qui sont enfermés dans les écrans de leurs smartphones (et souvent pour des réseaux ou jeux débiles) à l’instar des esclaves newyorkais, londoniens ou parisiens qui n’ont sur eux qu’une petite longueur d’avance dans la servitude volontaire à la marchandise mondialiste. Et je ne parle pas de la robotisation des coursiers, des caisses des magasins et des services des cafés restaurant qui achèvent dans la paresse intellectuelle et l’empressement inutile toute relation humaine sociétale fondant l’échange qui est la dynamique sociale d’un progrès ontologique réel.

2 / Le paramètre économique

Mobiliser physiquement c’est également affaiblir la production économique par ses forces vives envoyer au front. On connaît la faiblesse démographique de la Russie et la guerre économique occidentale qu’elle subit depuis 2014 et même si elle réussit à bien y résister, une mobilisation générale provoquerait inévitablement des difficultés économiques que le 1er paramètre évoqué ci dessus ferait évoluer en instabilité politique intérieure (du moins dans les régions mentalement occidentalisées).

Il y a ensuite en Russie encore beaucoup trop d’affairistes qui pensent qu’il existe un chemin du libéralisme économique qui resterait loin des ravins du libéralisme social.

Ceci est une foutaise totale et l’histoire des idées nous le rappelle à chaque instant comme par exemple en France, les oppositions politiciennes de façade entre une droite libérale économique et une gauche libérale sociale qui depuis la fin de la 1ère guerre mondiale ont progressivement convergé jusqu’à fusionner aujourd’hui dans un macronisme fanatiquement au service d’une pensée néolibérale nihiliste, économique (mondialiste) aussi bien que sociale (transhumaniste).

La trahison libérale européenne va aboutir

– à des hérésies anciennes comme ces prétendus socialistes qui vont détruire dans le sang les communes de Paris, Kronstadt, Berlin, Barcelone etc où se perdre eux mêmes comme en URSS dans un capitalisme d’État (donnant ainsi raison à Marx dans sa « Critique du manifeste de Gotha »)

– à des hérésies nouvelles comme ces prétendus nationalistes dont le souverainismes prend fin dès qu’ils s’approchent du trône, renonçant, à l’odeur de ses privilèges à quitter l’Union Européenne, l’OTAN et l’euro qui sont les acteurs de l’asservissement des peuples au capitalisme mondialiste.

3 / Le paramètre politique

Il y a certainement un paramètre politique qui intervient ici, car une mobilisation pour la guerre totale par rapport à sa rhétorique initiale fanfaronne obligerait le pouvoir russe à reconnaître ses erreurs d’évaluation, voire ses faiblesses, ce qu’aucun gouvernement accepte de faire sans risquer de devoir céder sa place.

Il y a certainement des solutions intermédiaires comme par exemple la mobilisation partielle comme celle réalisée à l’été 2022, le service civil etc…

La Russie aujourd’hui a opté pour l’attractivité financière concernant l’engagement sur le front russo-ukrainien (salaires importants et primes abondantes) obtenant effectivement de nombreux engagements supplémentaires en 2023 et 2024. Mais rien ne remplacera la motivation patriotique charnelle du soldat pour exiger une combativité optimale et durable de sa part. Avec une armée de mercenaires économiques ce sont eux et non l’État qui exigent et non l’Etat et cela peut conduire à une désunion charnelle des populations avec l’appreil d’État et des problèmes relationnels voire des frondes internes. Staline l’anticlérical l’avait compris quand en 1941 il appelle la conscience profonde russe à un élan patriotique pour « la guerre sacrée ».

D’un point de vue pragmatique je pense comme vous que la mobilisation générale est inévitable car nous sommes entrés dans un combat à mort contre l’Hegemon mondialiste et qui est existentiel pour la Russie autant que pour l’Occident (à ne pas confondre avec l’Europe réelle des peuples charnels).

Quelle serait pour vous la situation idéale pour terminer ce conflit ?

Depuis 2014 (et même avant) la Russie n’a jamais eu l’initiative géostratégique mais s’est contenté, toujours en dernière limite de réagir et toujours avec modération. Ce que j’ai appelé dès le mois de mars 2022 au commencement du SVO, l’attitude du « trop peu trop tard » qui aurait dû être radicalement abandonnée au lendemain du discours de Munich du Président Poutine en 2007.

Dans la guerre il n’y a pas selon moi de « situation idéale » tant que le dernier bunker ennemi n’est pas encerclé (surtout avec des adversaires nucléaires) mais des choix les plus adaptés à trouver le chemin de la victoire et quelque que soient les sacrifices qu’elles imposent.

Aujourd’hui la Russie est en guerre militaire contre l’OTAN qui a acquis un avantage géostratégique global en Europe à défaut d’une victoire par procuration en Ukraine (Finlande, Suède, modernisation, budgets militaires, Moldavie, Arménie etc…). L’organisation qui était en « mort cérébrale » (Macron 2021) s’est réveillée et monte en puissance, forçant une industrie militaro-industrielle occidentale intéressée à passer en économie de guerre pour alimenter la gourmandise de la guerre contre la Russie. Depuis 2022 les États occidentaux n’ont jamais été aussi soumis à la stratégie du Pentagone et leurs peuples jamais autant domestiqués à leur absolutisme idéologique, policier, sanitaire etc. Et les quelques pays qui grognent comme la Hongrie par exemple sont trop faibles et trop peu nombreux pour n’être malheureusement autre chose que « des exceptions qui confirment la règle ».

La solution idéale serait que les forces russes commencent par:

– Neutraliser des ressources aéroportées du renseignement de l’OTAN opérant dans l’espace international. A commencer par les drones stratégiques type « Global Hawk » qui appuient les attaques ukro-atlantistes en Mer Noire.

– Cibler les responsables politiques du régime bandériste sans exception ainsi que tous les visiteurs politiques occidentaux se rendant à Kiev, zone de guerre, car les criminels ne doivent pas dissociés de leurs complices.

– Lancent des opérations de grandes envergure sur les arrières de l’ennemi en développant, organisant et armant les réseaux de partisans pro-russes des régions ukrainiennes.

– Décréter un blocus total de l’espace maritime dans la baie d’Odessa etc.

Il faut enfin que le pouvoir politique russe expulse les ambassades de tous les pays soutenant l’Ukraine de près ou de loin, reinstaure la peine de mort pour trahison, intelligence avec l’ennemi, corruption au sein de l’appareil de Défense etc.

Les objectifs ont changé.

Aujourd’hui concernant seulement l’Ukraine, elle doit être amputée de tous ses territoires historiquement russes (Novorossiya, Donbass, Kharkov, Soumy, Tchernigov…), jusqu’au Dniepr et la frontière moldave et qui retourneront au sein de la Russie, tandis que le reste de l’Ukraine sera contraint à la neutralité définitive sous protectorat russe.

Toute trêve ou cessez-le-feu avant cette conclusion situationnelle ne sera qu’une pause pour relancer la guerre de plus belle à l’instar des accords passés de Minsk 1 (sept 2014) et Minsk 2 (février 2015).

En attendant il faut monter en puissance les forces russes en Ukraine, à minimum 2 millions de soldats, mais aussi renforcer toutes les frontières de la Fédération côté Occident et Asie centrale.

Sinon cette guerre durera trop longtemps dans une attrition qui se retournera contre la Russie.

Si on écoute une certaine propagande du côté russe, les choses « suivent le plan ». C’est d’ailleurs la même chose du côté ukrainien ! Certains « propagandistes » qui s’auto désignent comme « experts militaires » ne confondent-ils pas l’information et leurs propres souhaits ?

On observe effectivement une confrontation propagandiste au dessus du front qui atteint les sommets ridicules d’un courtisanisme manichéiste qui selon moi est totalement contre productif à l’effort de guerre surtout à notre époque où l’hyperommunication alternative permet tout à chacun de démêler assez rapidement le vrai du faux.

Les bouffonneries de ces experts de salon autoproclamés qui ne sont en réalité que des affairistes et courtisans narcissiques ont des conséquences graves pour la cause qu’ils prétendent servir à cause :

1 / De leurs analyses qui n’ont aucune valeur car fondées sur des fantasmes personnels et une communication officielle complètement obsolète et trompée par les rapports carriéristes des États Majors opérationnels.

2 / De leur manichéisme idéologique qui fait le grand écart entre une sous estimation méprisante des forces ukro-atlantistes et une surestimation dogmatique des forces russes.

3 / De leur orgueil qui refuse de reconnaître les erreurs commises et problèmes opérationnels existants et comme dans toute guerre les succès aussi réalisés par l’ennemi.

Ce faisant ces prétendus experts militaires et journalistes indépendants ne sont en réalité que des propagandistes plus royalistes que le roi et fredonnant en boucle « Tout va très bien madame la marquise » en référence à une chanson comique qui illustre bien leur fanatisme crétin.

Ces experts sont pires que les médias officiels dont tout le monde connaît et comprend leur rôle propagandiste car ils cachent leur psittacisme grossier sous l’imposture d’une indépendance journaliste dont ils n’ont ni la formation, ni les compétences et encore moins l’éthique.

Et le résultat de leurs logorrhées manichéistes est catastrophique :

1 / Ils participent à l’anesthésie de l’appareil politico-militaire qu’ils prétendent servir et qui finit tellement par croire (comme eux) à leurs mensonges qu’il envoie en février 2022 seulement 170.000 hommes sur 2000 km de front pour récupérer les bouquets de fleurs d’une population ukrainienne attendant ses libérateurs. On connaît la suite : des revers en série (à part sur les fronts de Marioupol et Zaporizhia) conduisant au premier repli des régions de Kiev, Tchernigov, Soumy, Nikolaïev au printemps 2022 et qui se sera suivi à l’automne par celui des régions de Kherson, Kharkov et même d’une partie au Nord de la République Populaire de Donetsk qui avait été libérée (Krasni Liman) le tout avec des pertes militaires et civiles dramatiques. Mais comme ont osé le prétendre certains de ces bouffons « Tout va très bien, le SVO suit le plan prévu ! ».

2 / Ce faisant, ils sapent le moral des gens qui ne comprennent pas la dichotomie entre les communiqués et le terrain jusqu’à pour certains une perte de confiance vis à vis du commandement politico-militaire qui malgré les erreurs commises a besoin d’une cohésion nationale autour de sa fonction. Heureusement ils font au moins rire les soldats du front.

3 / Ils négligent, par un courtisanisme inutile (sauf pour leurs affairismes personnels) une fonction essentielle que peuvent et doivent remplir les vrais reporters ayant les pieds sur le front militaire et la tête sur le front de l’information: celui d’un travail engagé mais critique participant modestement à la réalisation d’un retour d’expérience constructif permettant une évolution de l’art opératif militaire, à l’instar de « Rybar » ou du « Colonel Cassad » par exemple.

4 / Enfin, ils bafouent l’éthique informationnelle d’un journalisme dont ils revendiquent être les parangons, dans une surenchère de mensonges et de fantasmes qui ne font que confirmer qu’effectivement le ridicule ne tue pas (à titre d’exemple la théorie fumeuse de prétendre que la percée ukro-atlantiste réussie dans la région de Koursk est en fait un piège tendu par l’Etat Major russe).

Certains me trouveront très dur avec ces courtisans propagandistes, mais force est de constater et principalement avec les « convertis » venus de France servir la cause de la Russie qu’ils ont conservé les syndromes maladifs de la pensée unique occidentale : l’obsession du monopole de l’information, le recours à la censure, la calomnie, l’intrigue, la reductio ad personam etc.(sachant que le manicheisme, le courtisanisme et l’idiotie sont des traits communs à tous les propagandistes).

Pour terminer ma réponse il est vital qu’à l’aune de la guerre de l’information sur fond d’une saturation de réseaux alternatifs, les journalistes professionnels où qu’ils soient, retrouvent le chemin de l’éthique de leur profession magnifique afin de retrouver leur place et fonction véritable au sein de la société civile dont l’esprit critique est toujours affamé.

Sur notre chaine, nous ne donnons pas certaines informations soit parcequ’elles sont classifiées, soit parcequ’elles pourraient mettre en danger nos forces sur le terrain, soit, je le dis sans honte, parcequ’elles ne nous sont pas favorables. Nous ne mentons pas, mais ne disons pas tout.

Vous avez également une expérience de « correspondant militaire », comment voyez-vous la diffusion de l’information en temps de guerre ? Doit-on tout dire ? Doit-on délibérement mentir pour rassurer les lecteurs ?

Le mensonge par omission est bien sûr tolérable surtout lorsqu’il concerne des opérations en cours ou la sécurité de personnel.

L’information doit toujours être confirmée et si possible dénuée de tout caractère émotionnel (ce dernier ne devant être employé qu’exceptionnellemement pour des événements et actions particulièrement tragiques ou débiles).

La critique négative d’actions ou responsables de notre camp et qui n’est pas incompatible avec un engagement radical pour notre commune cause doit se faire dans le respect des personnes (pas d’insultes ad hominem) et toujours dans une démarche constructive proposant réflexions et solutions.

Je pense que la responsabilité de l’État est de proposer des formations aux correspondants, blogueurs, journalistes couvrant des opérations militaires pour les sensibiliser à la sécurité des personnels et opérations en cours.

Prenons un exemple récent : sur un média d’Etat j’ai vu un reportage couvrant l’arrivée des renforts russes dans la région de Koursk avec à l’arrière plan un convoi passant sur un pont géolocalisable certainement emprunté régulièrement par les forces russes. Entre la censure totale sans réflexion et la précipitation journalistique imprudente, il y a un juste milieu et surtout un retour d’expérience à réaliser pour et par tous les acteurs de l’information de terrain.

Dans cette recherche d’une information respectant à la fois l’engagement déclaré de ses acteurs et l’éthique du journalisme, je suis convaincu que tout le monde a à y gagner.

– Confiance du public visé
– Renforcement du lien social Autocritique constructive
– Amélioration de tous les acteurs…

Il faut surtout comprendre que le secret du mensonge fantasmé n’est plus possible aujourd’hui dans le domaine de l’information ou de l’analyse à cause de l’ « Open Source » (à l’instar du secret des mouvements militaires à cause des drones). Il convient donc d’éviter de prendre le public pour des cons car cela brise non seulement brise la confiance mais ouvre parfois en retour un sentiment défaitiste qui se révèle pire que l’anesthésie idiote recherchée initialement.

Je reviens sur les combattants, savent-ils ce que disent les médias (médias officiels, mais aussi chaines télégram) sur la situation militaire ? Qu’en pensent-ils ?

Bien sûr les soldats du front regardent quotidiennement les infos. Principalement celles diffusées par les vrais reporters du front pas ceux qui enfilent un casque mal réglé 3 fois par an pour faire un selfie et tenter de valider par l’imposture la propagande officielle des officines ministérielles.

Les médias officiels ne sont que très rarement suivis sauf à l’occasion des cérémonies ou des discours officiels ou de l’actualité militaire.

Concernant l’information militaire le soldat du front suit le travail d’information réellement indépendant des reporters du front, des vétérans aguerris, des patriotes ayant une expérience militaire, même si certains d’entre eux ont été déclaré parias par une communication officielle tentée par le confort paresseux d’une pensée unique absolutiste.

Mais cela n’ébrèche pas la motivation, le courage et l’enthousiasme des soldats russes qui sont dans leur immense majorité des volontaires habités par le sens de la camaraderie et le culte de la mission de que l’on peut ici comparer aux « vieux grognards » de la garde impériale française : râleurs et critiques mais toujours fidèles et hardis au combat… à l’image d’Igor Strelkov qui reste avant tout un soldat du front quelque soient les griefs qui lui sont reprochés.

Dans un certain institut réputé que je ne nommerai pas, un instructeur nous avait dit dans un cours sur la propagande « une information ne doit pas être forcement vraie, mais elle doit toujours être crédible. » Ne pensez-vous pas que dans certaines circonstances une information fausse peut être diffusée si elle, par exemple, désorganise l’ennemi ?

Là vous abordez le domaine de la guerre psychologique pour laquelle les réseaux d’information peuvent effectivement jouer un rôle.

Mais il ne peut s’agir d’initiatives individuelles mais d’une stratégie dirigée par les services de renseignement, qui contrôlent effectivement ce qui est nommé  » le brouillard de guerre » et les fausses informations crédibles qui a ce moment là sont d’autant plus efficaces qu’elles sont relayée par la partie adverse.

A noter ici que le caractère « offensive désespérée, offensive de la dernière chance, offensive suicidaire » etc entendu au sujet de l’opération ukro-atlantistes en région de Koursk a été initialement évoqué par des médias occidentaux prétendant en même temps et de « source sûre » que l’OTAN était ignorant de sa préparation (mensonge prouvé aujourd’hui). Nombre de propagandistes pro russes, pour nourrir leur fantasmes et rassurer leur public ont repris cette analyse précoce et qui n’est peut-être qu’un enfumage psychologique décidé par les ukro-atlantistes pour « tromper l’ennemi » Et dans ce domaine des guerres de l’information et psychologique ainsi que de la manipulation mentale des foules, force est de constater que les occidentaux ont des siècles d’expérience dans le domaine, au moins depuis l’empire carolingien.

Pour le moment, à part quelques acteurs à la critiques libre, argumentée et constructive, la communication russe reste malheureusement trop caricaturale, trop simpliste et pas assez rusée pour servir la guerre psychologique. A titre d’exemple ces communiqués officiels russes répétant jusqu’aux 23 février 2022 au soir que leurs forces n’interviendraient pas en Ukraine, alors que tous les rapports satellitaires de l’OTAN donnaient leurs effectifs et leur positionnements précis le long des frontières ukrainiennes.

La fausse information la plus efficace en terme de guerre psychologique est de dire à l’adversaire ce qu’il veut entendre et de flatter ainsi ses certitudes et fantasmes pour mieux les tromper par la suite.

Aujourd’hui les forces de l’OTAN par Ukraine interposée sont actives en Fédération de Russie depuis plusieurs jours, en particulier dans l’oblast de Kursk. Que vous inspire cette situation, et comment estimez-vous la réaction du Commandement Russe ?

L’offensive ukro-atlantiste dans la région de Koursk marque effectivement une nouvelle étape importante dans l’escalade par procuration entre Washington et Moscou commencée en 2014 par une guerre par procuration de l’OTAN contre le Donbass car depuis le 6 août, des combats terrestres majeurs se déroulent désormais sur le territoire non contesté de la Russie avec des moyens et des personnels occidentaux.

Cette offensive ukro-atlantiste commencé il y a 2 semaines a pour le moment permis aux forces ukro-atlantistes de réaliser un saillant dur de 500 km² dans la région Koursk au Nord de Soumy et un saillant mou périphérique de 300 km² environ, actuellement en nette rétractation, et dans lequel vagabondent des groupes de reconnaissance et diversion (DRG).

Cette offensive ukro-atlantiste même si elle est condamnée à être temporaire et hémorragique pour Kiev n’en reste pas moins après 2 semaines opératives un succès d’autant plus important qu’il était inattendu.

– succès militaire avec une préparation lourde maintenue secrète et une stratégie de manœuvres combinées,

– succès territorial avec la capture de 500 km² environ (et non les 1000 revendiqués par les actions éphémères des DRG),

– succès politique avec une déstabilisation de la rhétorique officielle décrivant une armée ukrainienne à l’agonie,

– succès diplomatique par politique du fait accompli relançant les aides militaires occidentales et débloquant leurs restrictions d’emploi.

– succès psychologique en choquant l’opinion russe qui n’avait pas vécu une invasion militaire étrangère depuis 1941

Plusieurs questions bien sûr se posent comme

– la faiblesse des défenses de cette frontière russe avec son ennemi gardée par des unités faibles et peu aguerries sans forces de réaction rapide dignes de ce nom derrière elles,

– l’incapacité du renseignement russe à avoir détecté les préparatifs et les concentrations frontalières mobilisant plus de 10 000 hommes et des centaines de véhicules blindés.

Mais l’heure n’est pas à chercher des réponses mais à trouver des solutions immédiates et rapides pour libérer le saillant ennemi et ensuite créer une zone tampon en territoire ennemi (et sur toutes les frontières communes).

La réaction russe me fait penser à la technique de nage du canard : d’apparence calme en surface mais pédalant de toutes ses forces en dessous lorsqu’un courant contraire surgit.

Comme à son habitude le Kremlin prendra certainement son temps pour sanctionner ceux qui doivent l’être mais en attendant il est urgentissime de réformer des moyens, des ressources et des procédures pour éviter que cette même catastrophe ne se reproduise une troisième fois (la première étant l’offensive de Balaklaïa en septembre 2022).

La décision de créer un comité de coordination de tous les organismes de défense et sécurité opérant dans les régions frontalières russo-ukrainiennes et supervisé par le général Dyumin, un conseiller spécial présidentiel est une bonne chose (si la recherche d’une numérisation horizontale du champ de bataille est l’objectif), mais on ne peut que regretter que l’appareil politico-militaire russe est ici encore dans la réactivité et non dans l’anticipation, conséquence certaine d’un attentisme atavique russe (qui a aussi des avantages) et d’une absence de RETEX ces nécessaires RETour d’EXpérience opérationnelle et réformateurs. Mais comme dit le dicton : « mieux vaut tard que jamais ! ».

En regardant l’évolution de la deuxième semaine de l’offensive ukro-atlantiste vers Koursk je reste optimiste car elle se dirige vers une nouvelle hécatombe ukrainienne de personnels et matériels qui accélérera la fin de cette guerre. Malheureusement les contre-attaques russes qui s’organisent ne seront pas exécutées sans des pertes civiles et militaires et des destructions qui auraient dû ne jamais être possibles, surtout après l’expérience des attaques sur la région voisine de Belgorod.

Cependant mon optimiste résiste à cette paresse propagandiste et fanatique de sombrer dans le fantasme jubilatoire car d’une part le front de Koursk n’est pas encore stabilisé au profit des russes mais surtout il subsiste des inconnues du côté ukro-atlantiste :

1 / Où sont les autres forces de réserve de Kiev (plusieurs centaines de blindés et les F16 par exemple) qui ne sont pas engagées sur un front du Donbass en péril ou en renforts dans le saillant de Koursk ? Car si Koursk était réellement l’offensive de la dernière chance comme le prétendent certains experts de salon, alors Syrsky y aurait jeté beaucoup plus de forces qu’une douzaine de milliers d’hommes et quelques vieux MIG 29.

2 / Ce premier point m’amène à envisager la possibilité que Koursk n’est qu’une diversion destinée à fixer le maximum de réserves russes avant une offensive principale. Cette stratégie classique de l’art opératif militaire a été mise déjà mise en œuvre par les ukro-atlantistes pour leur offensive réussie au Nord sur Balaklaïa (sept 22), précèdée par des attaques importantes au Sud sur le front russe de Kherson (à l’époque au Nord du Dniepr); et par celle sur le front de Zaporodje au Sud qui devait échouer mais qui a été aussi précédée par des attaques importantes sur le front opposé Nord d’Artemovsk.

3 / En périphérie de cette offensive de Koursk on observe une exacerbation critique des attaques terroristes du régime de Kiev contre les centrales nucléaires de Zaporizhia à Energodar et de Koursk à Kourtchatov. Dans le contexte d’une probable livraison débridée des missiles occidentaux longue portée, qui désormais frappent en toute impunité le territoire russe non contesté, nous ne sommes pas à l’abri d’une catastrophe bien plus dramatique que le saillant de Koursk.

4 / Enfin, dans cette offensive ukro-atlantiste vers Koursk les derniers lambeaux de l’hypocrisie occidentale sont tombés car leurs armes « réservées à la défense du territoire ukrainien » ainsi que leurs ressources de renseignement mais aussi leurs hordes de mercenaires et forces spéciales clandestines sont sans vergogne à l’œuvre sur le territoire russe de Koursk.

Je crains donc – tout en espérant me tromper – que cette offensive ukro-atlantiste de Koursk ne soit pas la fin du régime bandériste de Kiev mais au contraire le début d’une nouvelle étape conduisant à une escalade radicale qui servira de prétexte pour un engagement plus direct de l’OTAN dans cette 3ème guerre mondiale dirigée contre la Russie.

Une personnalité politique Russe sous couvert d’anonymat nous a envoyé un texte que nous avons publié ici

Pendant que certains meurent au Front, d’autres meurent de rire à Moscou.

On y lit en particulier « Il n’y a plus de lignes rouges. Plus aucune. Elles se sont dissoutes dans le sang des notres morts au combat. Demain ils bombarderont Moscou [etc] »

Partagez-vous cette réflexion sur les « lignes rouges » qui en effet semblent ne pas exister, puisqu’il n’y a pas eu de « réaction extraordinaire » à la « situation extrordinaire » qui est l’invasion certes locale de la Russie par des forces ennemies ?

Oui j’ai lu ce point de vue radical mais je ne partage pas son pessimisme final et surtout son émotivité même si je comprends sa déception, voire sa consternation, concernant cette ligne rouge reculant en permanence jusqu’à discréditer la parole officielle.

Il faut y voir aussi ici l’effet pervers d’une communication russe dont le bon sens, face à un ennnemi occidental consubtantiellement amoral et aujourd’hui suicidaire est totalement inadaptée. Au lieu de jouer sur cette rhétorique obsolète qui se veut dissuasive le Kremlin aurait du s’appuyer sur des actions punitives réellement démonstratives; car par définition une ligne rouge doit être de la couleur du sang de ceux qui ont tenté de la franchir, aussi la définir doit être considéré comme un acte solennel et non un clabaudage propagandiste.

Le pouvoir russe défend une cause juste et une vision ontologique saine mais il est aujourd’hui pris au piège de sa propre rhétorique :

– à l’extérieur, dans son propre attentisme géostratégique où malgré des discours diplomatiques et même pédagogiques exemplaires, il a trop tardé à réagir radicalement face à l’hégémonie occidentale,

– à l’intérieur, dans ses discours rassurants et son invincibilité fantasmée qui deviennent même contre productifs quand, inévitablement pendant une guerre, interviennent des mauvaises surprises.

Dans ce deux domaines l’émotion suscitée par le pouvoir finit par se retourner contre lui.

Concernant l’offensive vers Koursk, le franchissement de cette ligne rouge, qui d’ailleurs était encore hier partagée par les diplomaties occidentales au sujet de leurs armes modernes livrées à Kiev, est en train de voler en éclat et tous attendent aujourd’hui une réaction russe, enfin radicale et même violente, à cette agression hautement symbolique.

– Pour les occidentaux, afin de poursuivre l’escalade militaire russophobe de l’OTAN,

– Pour les russes, afin d’être rassurés sur l’intransigeance sécuritaire de leur pouvoir,

Le Kremlin, empêtré dans sa rhétorique des lignes rouges et gravement atteint par le succès initial de cette offensive ennemie doit donc à la fois, et très rapidement :

A / nettoyer Koursk de sa nouvelle occupation nazie humiliante,

B /sans tomber dans le piège de l’escalade tendu par l’OTAN,

C / et en rassurant sa population sur ses capacités à la protéger.

Je pense que cela doit être réalisé avant la fin du mois d’août car sinon l’émotion qui est palpable dans l’article que vous avez cité ne fera que croître.

Pour calmer les ardeurs fussent-elles désespérées du régime ukro-atlantiste, il est temps que les forces russes détruisent aussi l’appareil politique de Kiev ainsi que toutes les ressources de l’OTAN participant, de près ou de loin, à ses opérations militaires.

Pour calmer les inquiétudes fussent-elles exagérées de la société civile et militaire russe, il est temps que le pouvoir politique mène des actions défensives sans pitié a commencer par une épuration opérationnelle de ses États Majors politiques, militaires et administratifs.

Enfin pour réveiller et mobiliser dans leur totalité les populations de la Fédération sur le chemin de la Victoire, il faut que la politique informationnelle se débarasse de cette propagande débile prenant ses fantasmes pour des réalités et nomme enfin « guerre sacrée » ce conflit existentiel.

L’émotionnel et le fantasme n’ont pas leur place dans les actions ou réactions militaires car directement ou indirectement ils servent toujours l’ennemi (c’est pour cela qu’il sont l’objectif premier recherché de toute guerre psychologique).

Car si « la guerre est l’affrontement des volontés », ces dernières ne se forgent qu’au feu de la réalité des menaces et de la confiance envers ceux qui mènent les peuples au combat.

Alors les sacrifices, sans lesquels aucune victoire tactique ou stratégique n’est possible, n’ont même pas à être demandés ils sont proposés naturellement par les citoyens, à l’instar de ces centaines de milliers de volontaires qui tiennent le front du Donbass depuis plus de 10 ans.

Dans l’article évoqué ci-dessus l’auteur dit « il y aura très probablement des combats à Moscou même. Dans les rues. ». Partagez-vous cette opinion ?

Je n’y crois pas un seul instant. car il y aura nécessairement avant ce scénario catastrophe une réponse extrême et probablement nucléaire soit par le pouvoir en place ou par celui, plus radical, qui l’aura remplacé.

Par contre, concernant les bombardements ukro-atlantistes sur Moscou, c’est du domaine du possible et cela a d’ailleurs été fait avec des drones erratiques ukrainiens 2 ou 3 fois et sans conséquence.

Je parle ici de bombardements destructeurs réalisés avec les missiles longue portée de l’OTAN sur le point d’être livrés à Kiev (ne nous leurrons plus sur la morale hypocrite des restrictions éphémères accompagnant les livraisons d’armes occidentales aux bandéristes).

Dans ce scénario d’une frappe de Moscou par un missile occidental tiré par Kiev, la réponse devra être la même que si il était tiré par Washington.

Et cela ne changera pas grand chose car la 3ème guerre mondiale a déjà commencé depuis 2014.

Vous évoquez une mobilisation générale, cette idée revient un peu dans le domaine médiatique, d’ailleurs l’ordre de mobilisation partielle de 2022 n’a jamais été annulé. Il est probable qu’une mobilisation « partielle » se fera d’ici quelques semaines. Comment ressentez-vous la réaction au sein de la population russe, pensez-vous qu’elle est consciente des enjeux ? Quand on voit la vie actuelle à Moscou on se pose de sérieuses questions.

Nous avons déjà abordé le sujet de la mobilisation qui me paraît nécessaire pour mener cette guerre à la Victoire et le plus rapidement possible. Aussi je ne reviendrai pas ici sur les contre parties économiques, sociales, politiques, psychologiques qu’une mobilisation provoque inévitablement dans des proportions variables selon les époques mais aussi les populations culturelles et couches sociales concernées et qui par la suite ont un impact sur la qualité combative collective des soldats mobilisés.

Lorsque vous évoquez une « mobilisation partielle » je pense aussi que c’est une solution qui peut nourrir les besoins opérationnels sans déstabiliser l’ordre socio-économique.

A condition que la mobilisation soit largement anticipée car il faut pour les combats modernes au moins 6 mois de formation pour obtenir des soldats et non de la chair à canon.

A condition que les mobilisés soient sélectionnés, prioritairement par rapport à leur volontariat, leur expérience militaire, leur disponibilité sociale et leur remplacement économique immédiat.

A condition que les frontières soient fermées et que ceux qui refusent la mobilisation militaire soient envoyés en service civil obligatoire à l’arrière du front (humanitaire, industriel, hospitalier, logistique, administratif etc) avec salaire minimum.

Mais avant tout, il faut préparer l’opinion publique et les services concernés à la mobilisation pour qu’il n’y ait aucune surprise psychologique ou organisationnelles comme cela s’est vu lors de la mobilisation partielle de l’été 2022.

Enfin il faut qu’il y ait une équitabilité entre toutes les républiques de la Fédération dans leurs effectifs, avantages, formations, missions. avantages etc. Car une mobilisation de conscrits c’est aussi l’occasion de resserrer les liens de l’Union des peuples russes comme l’ont fait les volontaires du Donbass venus des quatre coins de l’empire et même au delà.

Concernant la situation militaire actuelle, de l’accélération de son évolution et des menaces atlantistes, et eu égard au délai de formation opérationnelle, je pense qu’une deuxième mobilisation au minimum partielle pour 800 000 combattants, devrait déjà être en cours.

Quant à la population civile urbaine elle est infectée effectivement par un progressisme et un consumérisme individualistes qui érodent le lien social l’identité collective mais aussi par l’urbanisation le rapport charnel au territoire naturel sacré.

La force ontologique d’un pays ne réside pas seulement dans la vivacité des cérémonies mémorielles ou religieuses mais dans une réalité communautaire transcendantale et transversale à toutes les couches de la société, ce qui est aujourd’hui compliqué avec des cloisonnements societaux rendus hermétiques par des communications virtuelles ou le dialogue humain le plus élémentaire n’est même plus nécessaire.

La ville est le premier abattoir de cette identité transcendantale chère au philosophe Toynbee et dont la cité au sens de la Civitas civilisationnnelle devrait être l’incarnation idéale. Or dans le monde occidental post-moderne et artificiel les grandes villes sont devenues l’hérésie de cette transcendance commune forgeant et protégeant les civilisations… les cités capitalistes derrière leurs apogées libérales, ne sont plus des trous noirs où les civilisations dégénérent et dont il ne sort avant naufrage – à quelques exceptions près – que des traîtres et des lâches.

Heureusement les grandes villes russes ne sont pas encore arrivées à cette déchéance citoyenne occidentale, mais l’individualisme consumériste qui s’y développe dans l’illimitation fantasmée d’un progressisme paresseux montre sans hésitation que la Russie occidentale est en danger d’elle même.

Une guerre, par ses sacrifices et ses tragédies humaines, peut paradoxalement sauver une société de la décadence ontologique de sa civilisation en restaurant et protégeant l’Entraide qui est le squelette social de tout corps société et dont la déclinaison radicale est la camaraderie militaire au combat.

Les populations urbaines seront donc plus difficiles à mobiliser, preuve qu’une « guerre cognitive » identitaire y est en cours, mais la cité de pierre restant toujours l’incarnation de la cité de l’âme, le jeu en vaut la chandelle.

L’armée en général, et la guerre en particulier, quand malheureusement elle survient, sont aussi l’athanor de la conscience citoyenne et qui lui rappelle que la quiétude urbaine devient toujours délétère et destructrice de l’harmonie en construction perpétuelle.

Vous êtes donc citoyen russe, je crois savoir que votre parcours pour obtenir la nationalité a été quelque peu cahotique ?

Non sans une certaine fierté j’ai effectivement obtenu après un long parcours du combattant administratif la citoyenneté russe dans la volonté de toujours servir ma nouvelle patrie choisie.

2 ans pour obtenir le passeport de la République Populaire de Donetsk et 3 ans celui de la Fédération de Russie. Cette galère contre laquelle 5 années en première ligne, 2 blessures et 6 décorations n’ont rien pu faire a été d’autant plus difficile à supporter que j’attendais surtout mon passeport russe pour pouvoir enfin en terminer avec ma blessure au bras nécessitant une amputation difficile enfin réalisée cette année et une prothèse en cours.

Ces péripéties bureaucratiques sont le résultat d’une paralysie bureaucratique infernale et que je n’ai jamais voulu contourner (contrairement à d’autres européens venus en Russie) en « graissant la patte » d’un fonctionnaire corrompu ou en « léchant le cul » d’un politicien affairiste.

De plus j’ai découvert que des marauds et puterelles et autres lâches français venus échouer leurs fantasmes en Russie avaient tenté en vain, à force calomnies de me nuire auprès des autorités fédérales pour m’empêcher de rester en Russie et surtout protéger la dictature de leur psittacisme francophone de courtisans narcissiques. Cela a freiné encore plus la montagne de paperasses à bouger.

Peu importe, car aujourd’hui c’est du passé et même une belle expérience de vie sur l’ennemi bureaucratique intérieur, la nature humaine et les pervers narcissiques.

Je vous demandais au tout début de cet entretien si vous n’avez pas de regret. Sans vouloir être indiscret, quels sont vos projets personnels ?

Mon engagement radical dans le Donbass pour lequel j’ai du abandonner de gré ou de force une situation professionnelle magnifique, des amis et même ma famille reste le moment le plus intense de ma vie qui en toute modestie en a connu d’autres.

Le Donbass et plus largement la Russie c’est pour moi une aventure métapolitique, militaire, rédactionnelle et surtout humaine exceptionnelles où j’ai rencontré une foule de soldats et de civils débordant de gentillesse, de résilience, de courage et animés par ce sens commun ici nommé « l’Union des peuples » et qui est une manifestation charnelle, sacrée et radicale du monde multipolaire pour lequel nous nous battons.

Alors non je ne regrette rien à part de ne pas avoir pu venir me battre pour le Donbass avant février 2015, et d’avoir fait confiance à des français qui se sont révélés n’être que des maroufles.

Aujourd’hui j’entame ma rééducation prothésiste, au milieu d’un nouveau parcours du combattant administratif, cette fois pour obtenir mes pensions légitimes, et surtout je prépare ma cinquième vie (après l’armée, la Bretagne, la Guyane et le Donbass) auprès de ma jeune épouse qui est mon plus grand bonheur vécu.

Mais je ne pourrais jamais oublier les soldats du front auquel j’ai l’audace de toujours vouloir appartenir en tant que vétéran.

Et pour continuer à servir dans cette communauté de combat dont la noblesse véritable est forgée par le sens de l’Honneur et de la camaraderie, j’espère pouvoir la rejoindre un jour en tant que reporter de guerre.

En attendant je laboure des feuilles blanches avec l’encre d’un stylo pour y semer mes souvenirs et mes pensées, mes regrets et mes espérances…

Erwan Castel
18 août 2024

Propos recueillis par Boris Karpov.
Rediffusion libre avec mention de la source :
https://boriskarpov.tvs24.ru

10 Commentaires

  1. Bonjour, permettez au vieil homme que je suis, vieux pied-noir qui n’a rien oublié, dont la jeunesse s’est passé avec l’armée, d’être un peu surpris, vu votre CV et ce que vous avez écrit qui est un des témoignages le plus probant que j’ai pu lire sur ce site, où M.Karpove nous abreuve de son mépris…
    Vous avez été saint-cyrien, officier, et les régiments paras que vous citez sont une référence, et je n’oublie pas la réponse à moi faite par une jeune lieutenant para, aujourd’hui colonel: « nous défendons la république… » J’avais cru que l’armée défendait la Patrie, Terre de nos Pères… Une chose m’étonne, compte tenu de ce qui précède, par votre engagement, là où vous êtes, mais le fait qu’en quelque sorte, vous avez donné votre âme. Ni voyez aucun reproche, seulement ma surprise.
    J’avais de bonnes et excellentes raisons de renier une patrie qui m’avait publiquement, et par la force des armes et de la sacro-sainte démocratie, renié. Je n’ai jamùais pu signer un formulaire d’émigration que soit en Amérique du Nord ou du Sud, en Afrique du sud ou en Australie. Je suis, et plus que jamais, dans mon grand âge et subissant la pourriture régnante, décidé à mourir français, sur le sol français, la Terre de mes Pères, à qui je ne veux et ne peux faire affront. La Passion de la France s’ajoute à ma passion personnelle. Je connais mon histoire de France, non pas la mensongère officielle, la réelle. Je sais d’où elle vient et je sais aussi où elle va. Quitte à vous faire sourire avec compassion, je sais de façon certaine qu’elle a partie liée avec le Christ, qui est son fondateur, son seul Roi, et que le royaume de France durera jusqu’à la fin des Temps. L’Eglise catholique seule a promesse d’éternité. Je comprends votre dégoût et que vous aillez cherché une patrie digne de ce nom, et je ne vous en fait pas reproche, mais je déplore amèrement la perte, pour la France, d’un fils de cette dimension.
    Comme les Disciples ont vu la Passion du Christ, son jugement inique, sa Passion , son ignominieuse mort en croix entre deux assassins, sa mise au tombeau, au point qu’ils ont cru tout perdu. Ainsi, nous voyons la France, ainsi que l’Eglise, configurées au Christ, en tout, elles ressusciteront dans la gloire, aussi vrai qu’il fera jour demain.
    Il se peut, dans un avenir proche, que Russes et Français, nous nous trouvions du même côté de la barricade, dans le même combat contre le mondialisme satanique, et qu’alors la France reprendra sa place dans le concert des Nations, je veux dire sa première place, dont elle a été chassée.
    Je ne suis pas prophète et ne prétends pas remplir une mission à moi confiée, moins encore m’en investir. Simplement; je vous fais part de ma surprise et de ma tristesse de voir ainsi un de nos meilleurs éléments nous quitter.
    Que Dieu vous garde, et le Saint-Esprit vous mène.
    Bien cordialement.
    Georges.

    PS: j’utilise ce pseudo qui est le prénom de mon plus lointain ancêtre connu. Par les temps qui courent, cela me semble prudent.

  2. J’aimerais une explication quant au titre choisi de l’interview : « la 4ème vie d’Erwan Castel ». Est-ce une allusion au 4ème pouvoir c’est-à-dire les médias ou quelque chose en rapport avec les vies antérieures de l’ancien officier de renseignement passé par Saint-Cyr, ancien guide de forêt en Guyane, etc. Dans ce cas, il aurait été souhaitable que monsieur Boris Karpov nous présente son CV succinctement. Son point de vue est intéressant mais n’est pas suffisamment synthétique et concis ; l’analyse du terrain s’égare dans des considérations personnelles qui altèrent parfois la pertinence. On ne peut être à la fois « influenceur » qui cherche à convaincre l’auditoire, idéologue regardant le monde comme un stylite et observateur impartial. Monsieur Erwan Castel a un petit côté Blaise Cendrars, un écrivain de la Grande Guerre, à qui il ressemble physiquement.

  3. Merci pour cette interview de M. Castel, sans détour ni faux-semblant qui confirme que l’homme de terrain sera toujours plus proche de la vérité que ses détracteurs, profiteur de guerre. Le prix qu’il a payé, et son engagement sans faille contre l’état terroriste de Kiev force le respect. Y’en a t il beaucoup d’autres avec ce courage ? J’en doute, certain français vivant en Russie (mais travaillant pour qui ??) feraient mieux d’en prendre de la graine. – Chez moi, quand les hommes parlent, les gonzesses se taillent.

  4. C’est avec des hommes comme Erwan Castel que l’on peut essayer de comprendre ce qu’est cette guerre et ce qui s’y joue au-delà de la propagande et bien plus profondément que la simple perception des grands intérêts géopolitiques, légitimes ou non, qui pourtant semblent diriger notre monde. S’il y en avait plus comme lui, ce monde serait meilleur.

    • Oui Denis Sined, s’il y en avait plus ! Et pourquoi n’y en a-t-il pas plus en France ?
      Je ne veux pas polémiquer mais on doit toujours attendre que les autres bougent pour les encourager seulement ?…..

      • Il n’y a pas plus de gens comme Erwan Castel en France tout simplement parce que les gens comme lui sont déjà parti combattre la cabale pedo-satanique là où elle apparait. Hier à Jérusalem, aujourd’hui en petite russie, demain à Paris. Du temps des croisades cette question n’existait pas, tout homme capable prenait les armes et partait défendre ce qu’il savait juste. Et le monde était meilleur. Lors de la grande guerre patriotique, tout homme capable a prit les armes et est partit défendre ce qu’il savait juste. Mais aujourd’hui des hommes comme M. Castel font peur à l’OTAN parce qu’ils voient au travers du rideau de mensonge et acceptent leurs destins. Ils font également peur à la population française parce qu’ils là mette face à leur mensonges, à leur paresse et à leur passivité. Les français sont des gagneuses bon prix, achetables pour un baril de brut et trois médailles aux Jeux Satanique d’Olympie. Difficile à admettre mais c’est la stricte vérité. Et cette vérité dérange tellement que tout est fait pour la cacher, censure au nom de la bien pensance, menace de notre culture reemplacé par le wokisme, meurtre de notre glorieux passé , en dehors de quelques havres comme la Russie, la parole est bâillonné pour que des gens comme M. Castel ne fassent pas d’émules. Pour conclure mon bon monsieur, et vous le sauriez si vous étiez comme moi un lecteur assidu de ce journal, c’est Dieu qui donne.

      • Le sacrifice est une vertu qui a essentiellement disparue en Occident, consumériste et individualiste, même chez ceux qui perçoivent peu ou prou le monde tel qu’il est en réalité. Il est d’ailleurs affligeant de noter que nos « élites » dégénérées et corrompues en parlent en l’occurrence sans savoir de quoi il s’agit, pour soi-disant défendre les « valeurs de la démocratie » (mais la démocratie libérale occidentale n’a jamais été ni démocratique ni libérale !), alors qu’elles se sont toujours efforcées de combattre le patriotisme et ceux qui sont attachés à leurs coutumes, trop difficiles à circonscrire dans le « progressisme » et infiniment plus réfractaires au contrôle social : comment dans ces masses molles qui sont le fruit de ces basses œuvres, dans cette jeunesse inapte, l’Occident pourrait-il lever des défenseurs enthousiastes, prêts à se battre pour un empire en perdition qui les a transformé en ectoplasmes sans racines ni identité ?

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