Il y a 15 ans: Prise d’otages au théatre “Nord-Ost” de Moscou

Certains en Russie et à l’étranger utilisent l’anniversaire de la tragédie du Nord-Ost pour critiquer l’attitude des forces de sécurité, ayant selon eux conduit à de nombreuses victimes parmi les otages. Rappellons que les seuls responsables sont tout simplement les terroristes, et que la courageuse attitude des autorités alliée à la compétence des services spéciaux sur le terrain a permis d’éviter le massacre de près d’un millier de personnes.
Rappellons également que les responsables de cette prise d’otages ont longtemps été protégés en Europe, en particulier en France, Allemagne et Angleterre, pays leur ayant accordé l’asile politique.
Editeur RusRéinfo

La prise d’otages dans le théâtre Doubrovka est un attentat de Moscou qui a duré du 23 au 26 octobre 2002 pendant lequel un groupe d’islamistes armés sous le commandement de Movsar Baraev a retenu en otages des spectateurs de la comédie musicale Nord-Ost au théâtre Doubrovka.

L’opération pour la libération d’otages a permis d’éliminer tous les terroristes et de libérer la majorité des otages. Au total, selon les informations officielles, 130 ont été tués (selon l’association Nord-Ost — 174 personnes).

Le plan de cet attentat d’envergure a été élaboré en été 2002 par le leader des bandes tchétchènes Aslan Maskhadov, «président d’Itchkérie». Ce plan prévoyait non seulement la prise de centaines de personnes en otages au théâtre, mais également l’explosion de voitures piégées dans des zones publiques fréquentées. Movsar Baraev était désigné à la tête du groupe terroriste.

La prise d’otages à Moscou prévoyait la participation d’environ 50 combattants, dont la moitié était supposée être des femmes kamikazes. Les terroristes ont fait venir les armes dans les coffres de voitures. Pour les camoufler ils utilisaient des pommes. De plus, début octobre 2002, trois bombes puissantes ont été transportées d’Ingouchie à Moscou dans un camion de pastèques. Les terroristes ont rejoint la capitale en empruntant des itinéraires différents. La plupart d’entre eux sont arrivés par le bus Khassaviourt-Moscou quelques jours avant la prise du théâtre. Certaines kamikazes se sont rendues à Moscou par avion d’Ingouchie, alors que Movsar Baraev est arrivé le 14 octobre à la gare Kazanski par le train accompagné de deux autres combattants.

Initialement les terroristes comptaient attaquer le palais de jeunesse de Moscou, le théâtre Doubrovka et le théâtre d’estrade de Moscou. C’est le deuxième bâtiment qui a été choisi pour cible car il se trouvait loin du centre-ville, possédait une grande salle et peu d’autres locaux.

L’édifice a été construit en 1974 rue Melnikov et s’appelait Palais de culture de la Première usine d’Etat des roulements. En 2001, il a été réaménagé et rebaptisé pour les besoins des créateurs de la comédie musicale Nord-Ost inspirée du roman de Veniamine Kaverine Deux capitaines.

Le 23 octobre 2002, à 21h15 des hommes armés en tenue bariolée, venus en trois minibus, ont pénétré dans le théâtre Doubrovka. La majeure partie du groupe s’est rendu dans la salle de concert où était jouée la comédie musicale Nord-Ost devant plus de 800 spectateurs. D’autres combattants ont fouillé les autres locaux du centre théâtral pour réunir les personnes s’y trouvant dans la salle principale. Au total, 912 personnes ont été prises en otages (916, selon d’autres sources). Parmi elles se trouvaient également des citoyens d’autres pays.

Les terroristes ont installé les bombes le long des murs de la salle tous les cinq mètres, ainsi que des ballons métalliques au centre et sur le balcon avec des kamikazes postées en permanence à proximité. Chaque ballon contenait un obus d’artillerie de 152 mm. Ces obus étaient remplis entre la paroi et l’obus avec du shrapnel. Les femmes terroristes s’étaient installées en quinconce le long du mur opposé. Ils couvraient la salle par secteurs de 30 degrés. Leur ceinture explosive contenait 2 kg de plastic et 1 kg de billes métalliques. Les explosions planifiées étaient dirigées les unes en face de l’autre pour un effet létal maximal. Pour cela a été installée une commande centrale.

Certains otages ont été autorisés à appelés leurs proches pour annoncer la prise d’otages et pour dire que pour chaque combattant tué ou blessé les terroristes abattront 10 personnes.

Les renforts de police sont arrivés au théâtre Doubrovka à 22 heures, ainsi que des forces spéciales, des militaires et des véhicules blindés.

Immédiatement après la prise d’otages certains acteurs et collaborateurs du théâtre, qui se trouvaient dans les locaux de service, ont réussi à fuir le bâtiment par la fenêtre et les sorties de secours. Tard dans la nuit les terroristes ont relâché 17 personnes sans aucune condition.

Le 24 octobre, à 5h30 une jeune femme est entrée dans le théâtre (il s’agissait d’Olga Romanova, vendeuse du magasin de parfums à côté), et à 8h15 — le colonel Konstantin Vassiliev. Tous les deux ont été abattus par les terroristes.

La première tentative de prendre le contact avec les terroristes a été entreprise le 24 octobre: à 00h15. Le député de la Douma (chambre basse du parlement) de Tchétchénie Aslambek Aslakhanov est entré dans le théâtre. Le leader Movsar Baraev a exigé de rencontrer les autorités. Après cela, jusqu’à la matinée du 26 octobre il a reçu certains politiciens russes (Iossif Kobzon, Grigori Iavlinski, Irina Khakamada), des médecins (la Croix-Rouge, Leonid Rochal, Anwar al-Saïd), des journalistes (Anna Politkovskaïa, Sergueï Govoroukhine, Mark Franchetti, un groupe de tournage de NTV), le président de la Chambre de commerce d’industrie Evgueni Primakov, l’ex-président d’Ingouchie Rouslan Aouchev, la chanteuse Alla Pougatcheva. Durant ces pourparlers les terroristes ont relâché plus de vingt otages.

Les moyens techniques ont permis de fixer plusieurs contacts téléphoniques des terroristes avec leurs complices en Tchétchénie, en Turquie et dans d’autres pays arabes.

Le 24 octobre, à 19 heures la chaîne qatarie Al Jazeera a diffusé le message du chef terroriste Movsar Baraev enregistré quelques jours avant la prise d’otages au théâtre: les terroristes se proclamaient kamikazes et exigeaient la sortie des troupes russes du territoire tchétchène.

Le 25 octobre, à 15 heures au Kremlin le président russe Vladimir Poutine s’est entretenu avec la direction du ministère de l’Intérieur et du Service fédéral de sécurité (FSB). A l’issue, le directeur du FSB Nikolaï Patrouchev a déclaré que les autorités étaient prêtes à laisser aux terroristes la vie sauves s’ils relâchaient tous les otages.

Les terroristes se comportaient de manière très agressive. Ils ont annoncé que dans la matinée du 26 octobre ils commenceront à tuer les otages.

La prise du bâtiment était élaborée par le QG opérationnel dès les premières minutes. Avant l’assaut les unités spéciales simulaient leurs actions sur un bâtiment identique.
Pour éviter une explosion inopinée et de nombreuses victimes il a été décidé de recourir au gaz neuroparalytique.

Dans la nuit du 25 au 26 octobre un groupe des forces spéciales s’est introduit au rez-de-chaussée du bâtiment où se trouvaient des locaux techniques. Les terroristes n’y descendaient pas en craignant les tireurs d’élite. Ils ont percé des orifices dans les murs et les parois. Cela a permis d’accéder à la ventilation, ainsi que d’installer des caméras.

Le 26 octobre, à 5h30 trois explosions ont retenti près du théâtre, ainsi que des coups de feu. Les forces spéciales ont lancé l’assaut vers 6 heures du matin. A 6h30 le porte-parole du FSB a annoncé que le théâtre était sous contrôle des forces spéciales et que Movsar Baraev et la plupart de ses complices étaient éliminés.

A 7h25, le conseiller du président russe Sergueï Iastrjembski a officiellement annoncé que l’opération de libération d’otages était terminée. Tous les terroristes ont été éliminés, les otages — libérés. Vers 8 heures du matin le vice-ministre de l’Intérieur Vladimir Vassiliev a déclaré que plus de 750 otages ont été libérés, 67 personnes ont été tuées. Près de 650 personnes ont été hospitalisées avec des blessures plus ou moins graves, certains n’ont pas pu être sauvés. Au final, le nombre de victimes a atteint 130 personnes (10 enfants), dont cinq tuées par les terroristes. Parmi les enfants tués — deux artistes du groupe d’enfants du théâtre. Selon informations officielles, 40 terroristes ont été abattus durant l’opération. 30 engins explosifs ont été évacués du théâtre, ainsi que 16 grenades F-1 et 89 grenades à main artisanales. L’équivalent TNT total estimé s’élevait à environ 110-120 kg. Le bâtiment a subi un préjudice pour plus de 60 millions de roubles (plus de 1,5 million d’euros à l’époque).

Un monument a été inauguré un an plus tard sur la place devant le théâtre, et une plaque commémorative avec les noms des victimes a été installée sur le bâtiment.

Une enquête pénale a été ouverte suite à la prise d’otages du 23 octobre 2002. Dans le cadre de l’enquête Chamil Bassaev, Zelimkhan Iandarbiev et Akhmed Zakaev ont été accusés par contumace d’organisation de l’attentat. Les deux premiers ont été éliminés en 2005-2006, Zakaev fuit la justice russe à l’étranger. L’enquête a établi que «Bassaev, étant le dirigeant d’une bande armée illégale sur le territoire de la République tchétchène a planifié des attentats à Moscou: des explosions dans les zones fréquentées et sociales». A ces fins il a créé une communauté criminelle de plus de 50 personnes. En juin 2003, le parquet de Moscou a suspendu les affaires pénales contre les preneurs d’otages du théâtre Doubrovka en raison de leur décès.

En avril 2004, le tribunal de Moscou a condamné à des peines de 15-22 ans de prison les frères Alikhan et Akhiad Mekiev, Aslan Mourdalov et Khanpach Sobraliev. Ils ont été reconnus coupables d’avoir fait exploser une voiture près d’un McDonald’s au sud-ouest de Moscou, ainsi que de complicité terroriste et de prise d’otages au théâtre.

Aslanbek Khaskhanov (22 ans de prison) et Zaourbek Talkhigov (8,5 ans en colonie pénitentiaire à régime renforcé) ont été également reconnus coupables de complicité dans la prise d’otages.

En juin 2007, l’enquête pénale sur la prise d’otages au théâtre Doubrovka a été suspendue suite au non-établissement de l’endroit où se trouvent les individus poursuivis et qui étaient recherchés par la direction de la police criminelle de la direction centrale du ministère de l’Intérieur de Moscou.

Le 17 décembre 2014 a été annoncée la reprise de l’enquête suite à l’interpellation de Khassan Zakaev. Selon l’enquête, il a organisé en 2002 le transport à Moscou d’armes et d’explosifs artisanaux qui ont été utilisés par les terroristes. Le tribunal militaire du district de Moscou a condamné le 21 mars 2017 Khassan Zakaev à 19 ans de colonie pénitentiaire à régime renforcé et a ordonné d’indemniser les plaintes civiles des victimes à hauteur de 37,5 millions de roubles (environ 550.000 euros). En août 2017, la Cour suprême a réduit la peine de Zakaev de 19 à 18 ans et 9 mois. L’un des complices de l’attentat, Guerikhan Doudaev, reste recherché au niveau international.

SputnikNews

3 Commentaires

  1. J’ai un peu honte du fait que les pays occidentaux, en pleine soumission, ont aidé et protégé des groupes terroristes destinés à semer le chaos.
    Le seul homme politique ayant l’intention de mettre fin à cette situation a été (et pour cause) le seul à avoir été complètement occulté dans nos médias de milliardaires, Mr François Asselineau.
    Je déplore tant le fait que nos politiques semblent être devenus les délégués de commerce des milieux d’affaires, que je vois de plus en plus comme ceux qui organisent les guerres contre les peuples.
    C’est un peu désespérant…

  2. Sans faire un décompte morbide des victimes, je crois que rien qu’avec celles du 9/11 les Etats Unis feraient bien de ne pas trop la ramener d’autant les forts soupçons de plus en plus avérés qui pèsent sur cette tragique affaire. Et ne parlons pas de ce qui s’est passé à Orlando et plus récemment à Las Vegas.

    Quant au gouvernement de la soit disant patrie des droits de l’homme, rien que le refus d’intervenir de son armée au Bataclan mais aussi celui de passer ses armes aux forces de police qui, elles, voulaient agir, sans oublier son inaction totale lors de l’ouragan Irma à Saint Martin, devrait faire fortement réfléchir les français quant à la légitimité d’un tel gouvernement.
    Une armée qui, bien que financée par les impôts des français, est toujours prompte à agir à l’international pour sauvegarder des intérêts financiers mais est incapable de protéger ses propres ressortissants sur le territoire national. Quant aux révélations qui ont été faites dans le livre de Jean-Loup Izambert et qui d’ailleurs n’ont jamais été démenties ni attaquées concernant la collusion des dirigeants français avec les terroristes et ceci depuis plusieurs décennies, il est terrible d’en déduire que les principaux malfaisants dans cette “guerre contre le terrorisme” sont avant tout les gens qui nous dirigent.

    Comme toujours l’occident est toujours prêt à critiquer la Russie mais fait preuve d’une cécité scandaleuse vis à vis de ses propres agissements. Monsieur Poutine s’est d’ailleurs fort bien exprimé sur le sujet remettant les pendules à l’heure et faisant honte à tous ses détracteurs qui font preuve de tant de mauvaise foi.

    https://www.youtube.com/watch?v=M1jQEkvzDPA

    Et j’ai bien peur qu’en la matière la Russie aurait bien des choses à nous apprendre et certains dirigeants occidentaux peuvent remercier Monsieur Poutine pour sa retenue et sa sagesse car les dossiers brulants doivent être malheureusement fort nombreux..

  3. Bien triste anniversaire, toutes mes pensées aux victimes tuées, blessées ou traumatisées à vie.
    Il n’y avait pas d’autres solutions face à la démence de ces kamikazes qui n’auraient pas hésité à tout faire sauter.
    J’avais des doutes qu’une telle organisation et planification ne pouvaient être l’oeuvre maléfique d’un groupe de terroristes.

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