Mis en place par la volonté de Vladimir Poutine, le visa idéologique qui s’adresse aux étrangers des 47 « pays hostiles » voulant venir s’installer en Russie parce qu’ils en partagent les valeurs traditionnelles, a fêté son premier anniversaire le 1er septembre dernier. Quel bilan peut-on faire à ce jour de cette initiative ? Pour le savoir nous avons posé la question d’une part à Vadim Sizonenko, premier conseiller de l’Ambassade de Russie en France, ainsi qu’à des Français qui ont récemment rejoint la Russie grâce à ce visa.
Le 1er septembre dernier a été célébré le premier anniversaire du lancement du visa idéologique destiné aux ressortissants étrangers partageant les valeurs spirituelles et morales traditionnelles russes.
Ce programme a été créé à la demande de Vladimir Poutine pour constituer une réponse directe aux aspirations de nombreuses personnes vivants dans des pays dits « hostiles » à la Russie, horrifiés par la dégradation morale qu’ils constatent en Occident, et désireux de vivre dans une société qui partage les valeurs spirituelles et morales traditionnelles qui sont les leurs. Si l’on en croit l’ambassade de Russie en France, les premiers résultats sont indéniablement positifs.
« Ce programme a suscité un intérêt réel, stable et qualitatif, explique Vadim Sizonenko, premier conseiller de l’Ambassade de Russie en France (photo). Afin d’accompagner les candidats, nous avons mis en place des ressources pratiques, notamment un mémo explicatif publié sur le site de l’Ambassade. Сe visa n’est pas une réponse à un phénomène de masse, mais une mesure ciblée et cohérente avec notre vision civilisationnelle pour attirer des personnes motivées, réfléchies et sincèrement engagées dans un projet de vie en Russie.»
Le programme du visa idéologique de la Russie trouve ses racines dans une volonté de préserver et de renforcer les valeurs spirituelles et morales traditionnelles du pays. Cette initiative, on peut le constater, a eu une influence significative sur l’immigration et l’expatriation vers ce pays depuis la France. Cette dynamique s’explique aisément : de nombreux Français, choqués par les tendances actuelles, expriment le besoin de renouer avec un mode de vie fondé sur des repères stables, des valeurs familiales et une cohésion sociale forte – autant de piliers de la société russe. L’idéologie ultralibérale dominante en Europe, le relativisme moral croissant, le manque d’avenir professionnel et un sentiment d’insécurité généralisé poussent certains à rechercher une alternative. La Russie, à travers ce programme, offre un horizon cohérent et structurant. Pour les candidats, ce n’est pas une simple question de migration, c’est un choix de civilisation.
« Ce visa, poursuit Vadim Sizonenko, est accordé sans test de langue ni de culture russe comme c’est le cas habituellement quand vous voulez venir vous installer en Russie. Il ouvre également des droits concrets. Ainsi, il donne accès à un permis de séjour temporaire de trois ans, permettant de travailler légalement, d’accéder aux soins médicaux dans les mêmes conditions que les citoyens russes, et de préparer une demande de titre de séjour, voire de naturalisation à terme. Aucun test préalable de langue ou de culture n’est exigé au départ, justement pour faciliter la transition. Il s’agit d’une porte d’entrée pragmatique vers une intégration progressive, mais réelle. Il ne s’agit pas de « facilités artificielles », mais d’un cadre solide pour ceux qui souhaitent sincèrement s’inscrire dans un avenir pérenne en Russie. »
Certains fâcheux prétendaient six mois plus tard que seuls 480 visas aient été délivrés pour des Français ce qui leur permettait d’argumenter que ce visa idéologique serait un flop. Pourtant lorsqu’il est question de sujets aussi essentiels que la spiritualité et la morale, les statistiques perdent de leur pertinence. Ce sont des domaines où l’âme et la conscience humaine priment sur les chiffres. Il est d’ailleurs significatif de constater que l’Ambassade continue de recevoir un flux constant de demandes de la part citoyens français souhaitant s’installer en Russie et notamment de jeunes diplômés qui constatent qu’ils n’ont plus d’avenir professionnel à attendre en France, mais aussi de professionnels expérimentés exerçant souvent des métiers manuels ou à des niveaux les classant dans la catégorie des « spécialistes » comme des ingénieurs, des médecins ; des familles nombreuses qui refusent les « nouvelles tendances scolaires », ou encore de célibataires en reconversion de vie.
Face à cette demande croissante, le gouvernement russe étudie actuellement des mesures complémentaires pour faciliter l’installation, notamment au niveau régional, afin de renforcer l’attractivité du programme tout en gardant son esprit.
« Les premiers retours sont globalement très positifs, termine Vadim Sovinenko. Ceux qui ont sauté le pas soulignent souvent la sécurité du quotidien, la cohérence sociale, le respect des valeurs familiales, et l’accueil chaleureux des communautés locales. Beaucoup disent avoir retrouvé en Russie une paix intérieure et un équilibre de vie qu’ils ne parvenaient plus à atteindre dans leur pays d’origine. Bien sûr, l’intégration demande des efforts, mais elle est rendue possible par un environnement social stable et une administration structurée. »
Bien aborder l’expérience du visa idéologique
Il existe en France de nombreux sites comme Russiable, ou FranceRussieServices, qui informent gracieusement les candidats à l’immigration en Russie de toutes les démarches indispensables à faire avant et après le départ. De même, l’Agence russe pour les initiatives stratégiques, avec le soutien du Ministère russe des Affaires étrangères, a élaboré un mémo destiné aux citoyens étrangers qui s’installent en Russie. Ce document est notamment disponible en langue française (format PDF)
D’autres comme « Fenêtre sur la Russie » disponible sur Telegram, publient des informations essentielles : vocabulaire russe, plan du métro, apps des taxis et bus en téléchargement gratuit, etc. Il est impératif de se renseigner auprès d’eux avant d’entreprendre le voyage. Il ne faut en aucun cas se fier aux « bons » conseils des Français déjà expatriés dont les intentions ne sont pas toujours désintéressées. Soyons clairs : le visa idéologique est une solution pérenne pour tous ceux qui veulent avoir une vie normale et qui sont capables de s’assumer.
Des expériences et des constats partagés
Alors oui, le visa idéologique est bien beau sur le papier. Mais pour en savoir plus nous avons rencontré une famille qui a fait le choix de quitter la France pour la Russie et bien d’autres Français arrivés plus ou moins récemment, qui ont accepté de nous donner les raisons de cette expatriation quelque peu surprenante de prime abord.
Ainsi Valentine et son mari Stéphane sont partis avec leurs quatre filles âgées de 4 à 13 ans. D’origine grecque et orthodoxe par son père, Valentine est arrivée en France à l’âge de douze ans et elle le dit elle-même : « J’ai eu l’impression alors de passer d’un paradis où la parole était libre à l’enfer où j’ai appris que l’école était politisée et qu’il fallait mieux me taire, et au fil du temps ça n’a fait qu’empirer. C’est pour ça que j’ai toujours fait ‘’l’école à la maison’’. Et nos filles ont un niveau scolaire bien supérieur à celui de l’école publique. Tout se passait bien jusqu’en août 2024 où une nouvelle inspectrice d’académie venue vérifier le niveau des enfants nous a informé qu’elle « ferait tout » pour que ces dernières soient impérativement inscrites dans une école publique. ‘’Tout’’ jusqu’à nous menacer de nous enlever nos enfants. Avec toutes les dérives liées au wokisme, à l’éducation sexuelle à l’école, à la limitation de la liberté d’expression, au racket, etc., il n’en était pas question. Après réflexion nous avons décidé de mettre les filles à l’abri en dehors de l’Europe, et seule la Russie véhicule des valeurs semblables aux nôtres. Nous avons des professions manuelles qui nous permettent de travailler n’importe où, alors le choix a été vite fait. Nous sommes arrivés en avril. Au début ça a été galère parce que j’avais fait confiance à un escroc français installé dans un petit village de Tchouvachie qui, en cheville avec un faux avocat, nous a extorqué 5200 € pour en fin de compte nous laisser en plan. Mais tout a fini par rentrer dans l’ordre grâce aux personnes des services de l’administration russe. Aujourd’hui, nous avons acheté une maison à rénover à Vladimir pour 7 000 €. Nos papiers sont en règle. Nous travaillons et nos enfants sont scolarisés dans un milieu sain. Non seulement nous ne regrettons pas notre départ mais, vu la situation en France qui ne fait qu’empirer nous sommes pleinement satisfaits de notre choix. Ici on est libres, heureux et en sécurité. »
Victor, jeune ingénieur spécialisé en développement d’infrastructure IA a fait lui un choix d’abord professionnel. « Les postes que l’on me proposait en France ne me convenaient pas. On me demandait plus de me ‘’fondre dans un moule de bisounours’’ plutôt que de démontrer mes compétences. Ici, ce sont ces dernières qui intéressent les employeurs. Le reste est secondaire. Je fais partie des premiers arrivants. J’ai commencé par m’inscrire à l’institut Pouchkine pour apprendre le russe pendant que je faisais les démarches pour obtenir mes papiers et trouver un emploi. Aujourd’hui tout va bien. J’ai un travail qui me permet de m’épanouir, un appartement, une petite amie… Non, pour rien au monde je ne reviendrai en arrière. »
Dominique 64 ans est arrivé à Moscou en tant que retraité. « J’ai la chance d’avoir été fonctionnaire toute ma vie, alors j’ai pu transférer ma retraite via l’ambassade de France ce qui m’assure des revenus. A mon âge je ne me voyais pas reprendre un emploi. Ici les gens ont des valeurs morales que je partage, qui sont celles de ma jeunesse. En France, entre l’insécurité et le reste, ce n’était plus supportable. »
Geneviève et Jean-Pierre avaient une boucherie-charcuterie près de Roubaix, dans le Nord de la France. Un commerce qui était dans la famille depuis quatre générations. Ils ont vu la population changer au fil du temps. Leur fils de 10 ans, un petit blond aux yeux bleus, était sans cesse harcelé à l’école… dans la rue. « Nous n’osions plus le laisser se rendre à l’école tout seul. Et même là il vivait un enfer. Notre commerce a été tagué, nous avons été menacés, raconte Jean-Pierre, parce que nous vendions du porc. Cette boucherie-charcuterie, c’était mon arrière-grand-père qui l’avait ouverte au début des années 1900. Jamais je n’aurais pu imaginer ce qui allait arriver. La France n’est plus la France. C’est un pays perdu. Certes, c’était un pari risqué. Nous avons tout vendu, transformé l’argent en crypto… Nous avons ouvert un commerce dans le centre d’une petite ville à deux heures de Moscou. Ici les gens sont gentils, courtois. Nous avons été accueillis avec curiosité mais avec beaucoup d’amabilité. Les Russes apprécient la charcuterie française et j’ai trouvé d’excellents fournisseurs pour mes préparations. Plus de tags sur la vitrine, plus de menaces, et notre fils s’est très vite fait des copains. Pour rien au monde nous ne reviendrons en France. »
Catherine, une jolie brune de 28 ans vient d’arriver avec son diplôme d’architecte d’intérieur. Elle aussi n’en pouvait plus de la France « moderne ». « Lorsque je faisais mes études, je devais faire dix/quinze minutes à pied entre l’école et mon studio à Toulouse. Sur le chemin c’était toujours la même chose : je me faisais insulter, siffler… Les ‘’chances pour la France’’ se permettaient des insinuations grossières que je ne veux même pas répéter. C’était insupportable. J’avais peur en permanence. Sincèrement, je n’envisageais absolument pas de construire une famille et d’élever des enfants dans cette atmosphère. Ici, les hommes sont courtois. Ceux qui m’abordent le font avec beaucoup de politesse. Si on leur dit ‘’non’’ ils n’insistent pas. Je ne me sens plus en danger. En plus ici j’ai découvert un secteur du bâtiment en plein essor. J’ai déjà trois propositions d’emploi alors que je viens à peine d’arriver. »
Quel bilan en retenir ?
Sur la totalité des demandes de visa idéologique déposées auprès des services du consulat, seules quelques-unes reçoivent un avis favorable qui permettent à ceux qui le souhaitent de s’installer en Russie. Les critères sont précis et la sélection impitoyable, car il faut regarder la réalité en face : pour s’installer en Russie il faut soit avoir un métier qui permette de travailler n’importe où dans le monde, soit être capable de se retrousser les manches et d’accepter n’importe quoi pour survivre, tout au moins le temps d’apprendre le russe. Car sans la langue russe inutile de rêver, personne ne peut s’intégrer. Quant à compter sur l’aide des français déjà installés, à moins que vous ne soyez prêt à dépenser beaucoup d’argent pour des conseils inutiles et des services inexistants, mieux vaut l’éviter. Surtout que sur place, les démarches relativement simples peuvent s’effectuer en deux semaines. Mais pour les pragmatiques qui ont mis toutes les chances de leur côté en assumant leur choix, le visa idéologique est synonyme d’une vie meilleure et surtout d’un avenir en sécurité.
Valérie Bérenger
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